Comment peut-on être socialiste ? 14 avril 2006
Par Thierry Klein dans : Politique.Lu 7 305 fois | 7 commentaires
Si Marx s’en était tenu à la découverte de la lutte des classes, on pourrait utilement s’en recommander pour tenter de réduire les inégalités qui naissent de cette confrontation inconsciente. Le problème, c’est que Marx en a déduit la nécessité de la dictature du prolétariat et que depuis lors, les courants socialistes, s’ils proclament une aspiration à l’égalité, sont en fait idéologiquement englués dans des tendances revanchardes et liberticides (qui pratiquement ont commencé avec la Révolution).
De façon très concrète, aujourd’hui, être socialiste, c’est en fait appartenir à un lobby réactionnaire qui croît défendre les intérêts de la classe dite moyenne (en fait extrêmement privilégiée) qui comprend les fonctionnaires et la plupart des salariés. La défense de ces intérêts n’a rien en soi de condamnable si ce n’est qu’elle est en fait animée par l’esprit de revanche face aux « privilégiés » représentés par (en vrac) patrons, actionnaires, hauts-fonctionnaires…
Ce n’est pas l’équité qui inspire réellement la politique de la gauche française, mais l’esprit de revanche.
En ceci , la gauche « dirigeante » trompe d’ailleurs un grand nombre des ses sympathisants, qui sont réellement inspirés par une volonté d’équité. Elle se trompe d’ailleurs parfois elle-même et devient alors totalement sectaire (Besancenot, Laguillier…).
Une vraie politique de gauche, aujourd’hui, consisterait à :
- au niveau international, défendre réellement les intérêts des opprimés, c’est à dire de populations dont la situation est pire que celle des esclaves de l’antiquité puisqu’à la privation de la liberté s’ajoute souvent l’impossibilité de vivre de façon décente et de manger à sa faim (en Chine, en Inde…).
- au niveau national, chercher l’intérêt du plus grand nombre et ne plus se limiter à un rôle de lobby revanchard. Qui ne voit qu’aujourd’hui la population française est asphyxiée par le niveau des impôts, la quantité de fonctionnaires, le taux de chômage ? Bref, que les forces productives de la nation ne peuvent plus jouer aucun rôle moteur, que le pays ne peut plus être tiré vers le haut ? Dans un tel contexte, toute tentative d’évolution est pourtant analysée par la gauche en termes étriqués de conflit de classe et non pas de bien général ?
Une telle gauche ne chercherait donc pas à s’opposer aux délocalisations sous le prétexte tout à fait égoïste et à courte-vue que celles-ci suppriment des emplois en France, mais s’opposerait à l’importation de tout produit qui résulte d’une exploitation de l’homme par l’homme (et « accessoirement », ce genre d’embargo devrait d’ailleurs être étendu à l’importation de produits nuisibles à l’avenir de la planète, ou dont la nature même s’oppose à l’idée que nous nous faisons de l’Homme). Elle agirait donc non seulement sur le plan social mais en tant que consommateur. De la même façon, car c’est en fait la même chose, elle s’opposerait aux initiatives qui mettent en danger l’avenir de la planète ou qui nient au fond l’essence même de l’être humain.
L’exemple du CPE est très éloquent à cet égard. Le CPE est une mesure à coût nul dont le seul risque est que certaines entreprises embauchent en CPE des candidats qu’elles auraient pu précédemment embaucher en CDD ou CDI. Pour ces candidats, évidemment, la situation est moins confortable et il y a une baisse de confort – mais pas de perte d’emploi.
En revanche, il est évident que d’autres entreprises créeront des emplois à cause de la flexibilité que leur donne le CPE, que certains CPE, rapidement promus, sortiront du système précaire en moins de 2 ans. Au final, le CPE est donc une mesure à coût nul qui crée forcément des emplois – et donc permettra à certains de s’en sortir, tout le problème étant de savoir à combien. Ni vous, ni moi n’en savons rien, mais pourquoi ne pas essayer ?
Mais la gauche française ne se focalise que sur les avantages apportés à l’entreprise (donc aux patrons) et sur les injustices du système (oui, évidemment, il y en aura mais c’est comme le nombre d’emplois créés… Ni vous ni moi n’en savons rien…Pourquoi donc la gauche n’intègre-t-elle que la dimension « injustices » et pas la dimension « emplois » ?).
Parce que l’esprit de revanche et son associé intime, la méfiance, prennent le pas sur le besoin d’équité.
Billets associés :- L’Open Source est-il de gauche ?
- A voté !
- De Rawls à Macron, en passant par l’école. De quoi le social-libéralisme est-il le nom ?
- Quelques notes sur « les armes de l’esprit »
- Cht’ilicon valley
Teasing : la droite laisse-t-elle plus de commentaires dans les blogs que la gauche ? 13 avril 2006
Par Thierry Klein dans : Politique.Lu 6 994 fois | 2 commentaires
Bon, ça y est, mon prochain billet « Comment peut-on être socialiste ? » est fini… C’est le pendant de mon billet d’hier « Comment peut-on être libéral ? ».
J’observe un peu la façon dont se passe les commentaires sur mon blog (et en général sur les blogs) et je serais prêt à parier que le billet sur le socialisme aura nettement nettement plus de commentaires que le billet sur le libéralisme… Les raisons ?
– d’une façon générale, la droite aime moins le débat d’idées que la gauche
– d’une façon générale, la gauche est plus intolérante et réagit de façon plus viscérale à la critique (on « est » – ou on naît – de gauche, on « devient » libéral).
– – la droite est toujours un peu honteuse de s’afficher: l’égoïsme est rarement loin derrière l’idée, et si on aime bien développer l’idée, on cherche toujours à masquer l’égoïsme.
Tout ça, ce sont évidemment des clichés. Si vous êtes de gauche, comme canard, c’est du poujadisme ou de l’anti-gauchisme primaire. Si vous êtes de droite, comme Loïc, vous allez nier l’égoïsme…
Pourtant, je m’en tiens à ma « prédiction »…
Qu’en pensez-vous ?
PS: le billet sera publié demain soir.
Billets associés :- De Rawls à Macron, en passant par l’école. De quoi le social-libéralisme est-il le nom ?
- Interdiction des sondages: article le plus pompeux jamais écrit sur le sujet
- Dialogue en faveur de l’évaluation
- Comment bien voter le 29 mai
- Chine 6 : Shanghaï
Le Nord : région numérique (ou pourquoi il faut prendre les choses par le bon bout) 11 avril 2006
Par Thierry Klein dans : High-Tech dans le Nord.Lu 5 946 fois | 3 commentaires
Réunion stupéfiante ce soir, où le consultant chargé de l’animation a voulu partir des moyens et des actions nécessaires, avant de définir tout objectif, la raison invoquée étant que « la vision, c’est pipeau » (je simplifie à peine).
Résultat: la liste d’actions, de moyens, de besoins (etc) élaborée dans la réunion est si générique qu’elle pourrait convenir à la construction de tout pôle professionnel, qu’il soit numérique, artistique, sidérurgique ou que sais-je encore.
Or, si depuis des années, nous nous heurtons à une impossibilité de construire ce fameux pôle numérique, c’est bien par manque de vision, de liant. Tout doit partir absolument de là, sinon comment rassembler des entreprises aussi variées que des SSII, des sociétés de jeu vidéo, des consultants, des éditeurs, etc…
Ma vision, c’est qu’il faut faire du Nord la grande région européenne du numérique, le pendant européen de la Silicon Valley, que j’appelle, faute de mieux et pour l’instant, la Ch’tilicon Valley.
(suite…)
- Cht’ilicon valley
- Vos idées de contribution pour le développement des TICE dans le Nord.
- Mon Irak à moi
- Interview : six questions sur le Capital Altruiste
- Quelques notes sur « les armes de l’esprit »
Cht’ilicon valley 10 avril 2006
Par Thierry Klein dans : High-Tech dans le Nord.Lu 5 671 fois | ajouter un commentaire
Quelques notes, en vrac, pour préparer la réunion de la « dernière chance », demain soir, pour la création d’un pôle numérique digne de ce nom dans le Nord…
Ce qui manque à la Région Nord pour devenir une grande région numérique :
Billets associés :- Le Nord : région numérique (ou pourquoi il faut prendre les choses par le bon bout)
- Interview : six questions sur le Capital Altruiste
- Capital Altruiste : année zéro
- Mon Irak à moi
- Vos idées de contribution pour le développement des TICE dans le Nord.
Comment peut-on être libéral ?
Par Thierry Klein dans : Politique.Lu 7 551 fois | comments closed
De toutes les théories politiques ou économiques, aucune ne me paraît moins ambitieuse que le libéralisme. L’idée même qu’il existe une main invisible qui régule l’ensemble de la vie économique et à laquelle il est nuisible a priori de s’opposer me semble une négation de tout ce qui a fait la grandeur de l’homme, qui a toujours essayé de comprendre les lois de la nature pour la dominer et non pas pour la subir.
Lorsque Newton a découvert la gravité et les lois fondamentales qui régissent les mouvements des corps, l’Homme s’en est servi pour faire des fusées et se débarrasser des superstitions qui associaient le mouvement des planètes avec les événements humains. De nos jours, sauf pour Elisabeth Tessier, les planètes ne parlent plus : elles se meuvent selon les lois de Newton.
Mais quand Adam Smith a découvert les lois du marché, ses adeptes s’en sont servis pour affirmer de façon quasi-superstitieuse que les interventions d’un état dans l’économie sont a priori nuisibles et dangereuses.
Pourtant, les » lois » d’Adam Smith sont beaucoup plus contestables scientifiquement que celles de Newton. Elles sont souvent prises en défaut et surtout, elles ne reposent de façon ultime que sur des comportements humains que nous pouvons espérer modifier plus facilement que les comportements des planètes.
Autre proverbe de nature superstitieuse et conservatrice – pourtant repris de façon admirative à toutes les sauces : » Il faut laisser du temps au temps » (François Mitterrand).
Ne manquez pas, demain, votre nouveau billet « Comment peut-on être socialiste ? ».
Billets associés :- Adam Smith’s Paradise Lost
- Le Paradis Perdu d’Adam Smith
- Ce que le joueur d’échecs d’Edgar Poe nous apprend sur la révolution numérique
- La préservation des animaux : urgence et éthique (2/3)
- La valeur travail existe-t-elle ?
Quelques gouttes d’huile dans les rouages pour Capital IT 29 mars 2006
Par Thierry Klein dans : Posts in english.Lu 4 007 fois | ajouter un commentaire
La sélection pour Capital IT passe par une phase de « coaching » du dirigeant. J’y allais sans espérer grand chose au départ tellement j’ai tout vu, et surtout du n’importe quoi, dans ce domaine.
- Interview : six questions sur le Capital Altruiste
- Altruistic Capital: Year Zero
- Capital Altruiste : année zéro
- Le Business Plan du Capital Altruiste, en une page
- Ce que le joueur d’échecs d’Edgar Poe nous apprend sur la révolution numérique
Intelligence artificielle artificielle pour les sites pornos 28 mars 2006
Par Thierry Klein dans : Technologies.Lu 4 166 fois | 1 commentaire
C’est marrant comment même les activités les plus masturbatoires qui soient peuvent devenir collaboratives.
Vous connaissez tous les « captcha » un peu tordus utilisés pour bloquer les spammeurs…
L’idée est que plus le captcha est biscornu, plus il est difficile pour un programme de reconnaissance de caractères de le comprendre – et donc plus il est efficace contre le spam.
Et bien, maintenant, des sites pornos offrent des accès gratuits aux utilisateurs qui résolvent un captcha (comme il y a des millions d’utilisateurs intéressés, c’est assez efficace pour répandre le spam).
Ce n’est qu’un début, le combat continue.
Via Boing-boing.
(Et oui, je sais mon captcha est nul: il vous empêche parfois de laisser des commentaires et ne bloque pas vraiment le spam… Tout pour plaire !)
Billets associés :- Interview : six questions sur le Capital Altruiste
- La valeur travail existe-t-elle ?
- Michel Rocard et le brevet logiciel
- Pour une nouvelle forme d’entreprise humanitaire
- Au-delà de cette limite, le service public n’est plus valable
En avant première, le bilan des manifestations contre le CPE du mardi 28 mars 27 mars 2006
Par Thierry Klein dans : Politique.Lu 3 282 fois | 6 commentaires
Succès mitigé, inférieur aux attentes (surtout dans le Sud)
- L’hypothèse Zemmour : l’homme dont le principe est la laideur
- De Rawls à Macron, en passant par l’école. De quoi le social-libéralisme est-il le nom ?
- Pourquoi il s’est trompé : la vérité sur l’affaire Bourdieu
- Microsoft prêt à relever son offre pour convaincre Yahoo!
- Un blog dont le design est calqué sur celui du Journal du Net
Petits arrangements entre amis
Par Thierry Klein dans : Politique.Lu 4 653 fois | ajouter un commentaire
Il est tout à fait possible à un homme politique d’interdire l’utilisation de son nom par un autre site (cf l’utilisation que fait l’UMP des mots clés « Ségolène Royal » ou « Arlette Laguiller ») par exemple. D’ailleurs, il se peut que même la responsabilité de Google soit engagée…
Voir le billet juridique de Blandine à ce sujet.
On comprend que l’utilisation de son nom par l’UMP fasse plaisir à Loïc, mais pourquoi les hommes politiques ou les partis politiques, dont il suffit d’observer le comportement parlementaire pour constater qu’ils sont procéduriers en diable, hurlent-ils à la mort, et s’amusent-ils à des jeux puérils et inutiles (tels qu’essayer de faire cliquer leurs adhérents sans fin sur les pubs Google) au lieu de faire ce qui s’impose: une simple action judiciaire ?
Billets associés :- Google : la fin du début ? / Google : the end of the beginning ?
- Quelques vérités sur un débat truqué
- La stratégie du chiffon rouge
- La vérité sur l’affaire Free – Google.
- 10 raisons pour lesquelles les 10 raisons de Loïc sont mauvaises
Loi DADVSI : "It turns out the French are good for a couple things."
Par Thierry Klein dans : Technologies.Lu 4 033 fois | 3 commentaires
C’est l’avis de Stephen Speicher sur EnGadget. Je suis assez d’accord avec lui.
« This leads us back to the French. Ahh, the French… As a jingoistic proud American, I am predisposed to abhor the phrase « The French are right. » Yet, one has to wonder if there is some merit to their stance. While I won’t go so far as saying that Apple should be forced to open their platform (that’s Apple’s decision to make), I do fully support France’s decision (should Apple not open up their formats) to make it legal to circumvent protection for one’s own purposes.
Apple (and all DRMers) need to live with the consequences of their decisions. Content wants to be free. Content wants to move. If your business relies on locking down content, you should be responsible for locking it down. If your DRM isn’t strong enough, that’s your problem. Governments aren’t… well… shouldn’t be in the business of picking winners. That’s not to say that the government shouldn’t find and prosecute those who steal / publish / etc. illegally. To that end, the French bill includes several provisions for punishing pirates. Governments simply need to learn the difference between theft and « activities that could lead to theft. » And as much as my mouth will hate doing this, I must begrudgingly force it to say that maybe, just maybe, the French government understands that difference. Alas, I will apologize to my mouth by treating it to a nice Cab. It turns out the French are good for a couple things. »
Je pense qu’il aurait fallu aller un peu plus loin, dans l’intéropérabilité, l’accès des consommateurs aux morceaux individuels (à partir du moment où ils sont commercialisées) et aussi les aspects contrôle/répression (je ne vais pas me faire des amis…).
Mais vous verrez que beaucoup de pays s’inspireront, tôt ou tard, de la loi française…
Billets associés :- Apple: les nullos en marketing
- Interview : six questions sur le Capital Altruiste
- L’Open Source est-il de gauche ?
- Altruistic Capital: Year Zero
- Similarities and differences between Altruistic Capital and Mohammed Yunus Social Business