jump to navigation

Mon billet de 2005 sur Lance Armstrong (ça devient lassant d’avoir raison) 21 janvier 2013

Par Thierry Klein dans : Sport.
Lu 4 538 fois | ajouter un commentaire

Le billet ci-dessous date de 2005 (publié dans ce même blog).


La première chose intéressante à propos des révélations de l’Equipe sur le dopage de Lance Armstrong, ce sont les déclarations des autres coureurs et des professionnels:

Ullrich : “Il reste le plus grand coureur de tous les temps”

Holczer (Directeur Sportif de Gerolsteiner) : “Jusqu’à preuve du contraire, il faut être pris positif pour être convaincu de dopage… Donc je ne comprends pas cette situation”

Fignon: “Ca va servir à quoi ? Ce qui m’intéresse, c’est la prévention vis à vis des jeunes” (Sic !)

Or, Ullrich est arrivé second du Tour un nombre incalculable de fois à cause d’Armstrong. Sa colère serait tout à fait légitime. La tricherie d’Armstrong lui crée un préjudice incalculable. Mais étrangement, Ullrich n’attaque pas Armstrong !

Solidarité de cyclistes ? Grandeur d’âme ? Je n’y crois pas une seconde. La réalité, c’est probablement qu’Ullrich se protège lui-même par avance. Ullrich a été contrôlé de multiples fois au même moment qu’Armstrong et craint, probablement à raison, que les nouvelles méthodes d’analyse ne révèlent sa prise de dopants. Ca pourrait être plus tôt qu’on ne le pense, car l’Equipe indique qu’il reste 6 flacons positifs ne provenant pas de Lance Armstrong (mais provenant probablement d’autres coureurs bien placés puisque ce sont les premiers concernés par les tests). Attendons.

[Remarque 21/01/2013: Ullrich a depuis été condamné plusieurs fois pour dopage]

Le deuxième point, c’est qu’on imagine mal Armstrong se dopant en 1999 et, touché par la grâce divine, cesser de se doper lors des Tours suivants. Mais à partir de 2000, les techniques d’analyse EPO étaient devenues fiables. Alors, comment Armstrong s’y est-il pris ? A-t-il utilisé des nouveaux produits non recherchés ? Des produits non identifiables (hormones de croissance) ? A-t-il utilisé des protocoles différents ?

Ce qui caractérise l’activité d’athlète d’Armstrong, c’est que c’était l’homme d’une seule course (le Tour). Armstrong disparaissait pendant les mois d’hiver, s’entraînant le plus souvent en dehors de France. Il “revenait” quelques semaines avant le Tour pour une ou deux courses de préparation. Psychologiquement, il y a un autre point important: si les autres professionnels du cyclisme couvrent Armstrong, Armstrong a lui toujours couvert le Docteur Ferrari (récemment condamné et reconnu comme le grand spécialiste des produits dopants et de leurs protocoles). Même raisonnement que précédemment donc: je parierais pour un protocole effectué en grande partie pendant la période de préparation “hivernale”, suivi par des “prises complémentaires” à petites doses et non détectables pendant la phase de compétition, le tout mis au point par Ferrari.

[Ajout 21/01/2013: le paragraphe ci-dessus décrivait très précisément les méthodes mises au point par Amstrong, selon le récent rapport de l’USADA).]

Troisième point intéressant: la réaction anti-américaine primaire du Monde : “L’Amérique, elle, refusera systématiquement d’apporter le moindre codicille à son dithyrambe, faisant encore récemment de son héros un candidat potentiel à la présidence du pays. Ce ne sont pas les dernières révélations qui semblent vouloir la dessiller.”

Evidemment, le Monde, lui, jouerait le redresseur de torts immédiat vis-à-vis de tout athlète français soupçonné de dopage par un journal américain (il n’y en a pas beaucoup car aux USA, les athlètes non américains n’intéressent personne !)…

Je suis convaincu que le Monde a tort, d’ailleurs, et que les réactions américaines seront très fortes, dès que la réalité des preuves aura été admise. Armstrong tombera très probablement à la suite de procédure menées aux USA – visant à la fois le coureur et l’UCI qui visiblement le protège.

Enfin, un peu de prospective. Les principaux lésés de ce genre d’actions sont, de façon générale, les “perdants” non dopés et leurs sponsors. Jusqu’ici, il n’y a jamais eu d’action judiciaire en réparation intentés par des tiers auprès de tribunaux américains, mais les indemnités que des sportifs pourraient réclamer sont immenses: ils sont lésés moralement et financièrement. (il y aurait bien sûr la réparation de leur préjudice, mais aussi tous les “punitive damages” qui tomberaient car la mauvaise foi et la tricherie sont patentes).

Or l’affaire Armstrong va probablement être judiciarisée (Armstrong est en conflit avec une compagnie d’assurances qui refuse de lui verser une somme à cause des soupçons de dopage). Je pense que, dans la foulée, on va voir dans les prochaines années fleurir des actions judiciaires intentées par des sportifs contre d’autres sportifs.

[Ajout 21/01/2013: les actions en réparation n’ont pas été encore entamées par les sportifs (ça viendra) mais les sponsors (US Postal) et les assurances vont réclamer à court terme des dommages et intérêts à Armstrong.

Billets associés :
del.icio.us:Mon billet de 2005 sur Lance Armstrong (ça devient lassant d'avoir raison) digg:Mon billet de 2005 sur Lance Armstrong (ça devient lassant d'avoir raison) spurl:Mon billet de 2005 sur Lance Armstrong (ça devient lassant d'avoir raison) wists:Mon billet de 2005 sur Lance Armstrong (ça devient lassant d'avoir raison) simpy:Mon billet de 2005 sur Lance Armstrong (ça devient lassant d'avoir raison) newsvine:Mon billet de 2005 sur Lance Armstrong (ça devient lassant d'avoir raison) blinklist:Mon billet de 2005 sur Lance Armstrong (ça devient lassant d'avoir raison) furl:Mon billet de 2005 sur Lance Armstrong (ça devient lassant d'avoir raison) reddit:Mon billet de 2005 sur Lance Armstrong (ça devient lassant d'avoir raison) fark:Mon billet de 2005 sur Lance Armstrong (ça devient lassant d'avoir raison) blogmarks:Mon billet de 2005 sur Lance Armstrong (ça devient lassant d'avoir raison) Y!:Mon billet de 2005 sur Lance Armstrong (ça devient lassant d'avoir raison) smarking:Mon billet de 2005 sur Lance Armstrong (ça devient lassant d'avoir raison) magnolia:Mon billet de 2005 sur Lance Armstrong (ça devient lassant d'avoir raison) segnalo:Mon billet de 2005 sur Lance Armstrong (ça devient lassant d'avoir raison) gifttagging:Mon billet de 2005 sur Lance Armstrong (ça devient lassant d'avoir raison)


La vérité sur l’affaire Free – Google. 4 janvier 2013

Par Thierry Klein dans : Aliénation,Google,Politique.
Lu 5 747 fois | ajouter un commentaire

Free / Google

1) Quel enjeu économique ? Free estime que Google prend trop de la valeur de l’internaute et met la publicité en « opt-in » (c’est son droit de vouloir rééquilibrer le business model en faveur du « tuyau », on peut juste s’étonner que personne ne l’ait fait avant). Free prend grosso modo 30€ / internaute / mois et Google a peu près la même chose (indirectement, sous forme de revenu publicitaire généré par l’Internet). Cela a donc un grand sens économique pour Free d’aller attaquer le revenu pour l’instant capté par Google. Il peut y multiplier par deux son chiffre d’affaires.

2) Que reprochent les internautes à Free ? Alors que toutes les « bonnes » pratiques publicitaires sont en opt-in, tous les internautes hurlent, par Twitter interposé, contre Free qui ne fait au fond que mettre en œuvre une politique opt-in réclamée à corps et à cri par ces mêmes internautes pour les mails… C’est surprenant sur le fond et sans doute un symptôme a) d’aliénation collective et 2) de très forte efficacité de la pub Google qui semble vue comme inséparable, voire plus importante, que le contenu. Voir aussi Comment Google contribue au rétrécissement du savoir.

3) Imagine-t-on un système similaire pour la télé, qui couperait la pub ? Oui, car il y a eu des tentatives (et même des boîtiers anti-pub qui sont sortis), la plupart du temps avortées car illégales ou fonctionnant mal. Mais la réaction du public est inverse pour la télé (cf les débats lors de la privatisation de TF1 sur les films coupés … et aussi la valeur sentimentale de mesures telles que l’absence de pub sur les chaines publiques). A la télé, les gens veulent moins de pub mais sur Google ils en veulent plus !

4) Fleur Pellerin se déclare plutôt en faveur de Google (politique opt-out), ce qui est idéologiquement contradictoire avec le fait d’être à gauche, au sens où ce qui définit la gauche, c’est – ce devrait être – la lutte contre l’aliénation. Mais aussi contradictoire avec sa position sur la presse. Car si on admet que Google « prend » trop de valeur au détriment des journaux, pourquoi ne pas être ouvert a priori à toutes les tentatives de déplacement de cette valeur ? Free vient au fond de mettre en place un mécanisme qui force Google – et potentiellement toutes les régies de pub – à discuter ! [Vous pouvez être certains que la vision « presse » n’est pas absente dans la stratégie de Free, Xavier Niel est aussi patron du Monde].

Derbière contradiction pour finir, Pellerin privilégie aussi Google, qui ne crée pas d’emploi en France, sur Free, qui en crée (au moins potentiellement). Bonjour le redressement productif.

5) Nicolas Colin, co-auteur du meilleur livre sur l’économie numérique de l’année dernière se retrouve à la tête d’une mission dont le but est de définir un nouvel impôt sur la multitude, c’est à dire sur les données. L’idée de base est que Google utilise la richesse des français pour son business et donc les données que possèdent Google, utilisées pour servir statistiquement le bandeau publicitaire le plus pertinent possible, peuvent, à ce titre, être taxées. Cela permettrait aussi de taxer Google dès aujourd’hui sans avoir à unifier les politiques de TVA européennes (doit-on taxer là où est le serveur de Google ? là où est l’internaute ?) , ce qui peut prendre 10 ans. Mais il y a pour moi un vice de fond: que se passe-t-il si une entreprise possède les données (taxables) sans pouvoir en tirer de revenu (car c’est le « tuyau » qui en profite le plus). Le modèle « Colin » taxe donc potentiellement des entreprises sans revenu. Il serait intéressant de l’entendre à ce sujet.

6) Google est réellement, fondamentalement menacé par ce genre de modèle. Il a systématiquement lutté contre toutes les tentatives de « dérive » de revenu publicitaire, même très mineures et même quand une vision à court terme aurait pu être à son avantage économique immédiat (fraude au clic, voir le cas de la fraude au clic et des moteurs de recherche solidaires ). Free a coupé aussi l’info qui permet à Google d’avoir un retour sur les clics, donc toute possibilité de chiffrage et de facturation de leur pub ! La France doit vraiment commencer à les emmerder. On est vraiment une grande puissance.

7) Quand j’étais petit, deux choses ne rentraient pas à l’école: les croix et la pub. L’église a fait tomber l’interdiction des croix depuis longtemps et Google a fait tomber l’autre barrière puisque les écoles paient des ordinateurs pour que les élèves y reçoivent de la pub. Ce que Free tente de faire pour des raisons économiques, l’état français aurait dû l’imposer à Google depuis longtemps pour des raisons politiques.

 

8 )   La réponse de Google est à mon avis déjà prête. C’est trop important pour eux pour ne pas réagir. Au-delà de la réponse médiatique (ça semble déjà parti) et / ou légale, je parierais qu’ils ont des possibilités déjà prêtes pour faire varier le code servant les pubs, de façon à contourner un filtrage. On peut envisager des algorithmes générant des millions de façons différentes de présenter les pubs, ceci variant à chaque seconde. A la fin, c’est le plus avancé techniquement, c’est à dire à mon avis Google, qui gagne. Et comme d’habitude sur le Net, « code will be law« .

[Cet article, écrit à la va-vite, sera revu et corrigé. En attendant, régalez-vous.]

Billets associés :
del.icio.us:La vérité sur l'affaire Free - Google. digg:La vérité sur l'affaire Free - Google. spurl:La vérité sur l'affaire Free - Google. wists:La vérité sur l'affaire Free - Google. simpy:La vérité sur l'affaire Free - Google. newsvine:La vérité sur l'affaire Free - Google. blinklist:La vérité sur l'affaire Free - Google. furl:La vérité sur l'affaire Free - Google. reddit:La vérité sur l'affaire Free - Google. fark:La vérité sur l'affaire Free - Google. blogmarks:La vérité sur l'affaire Free - Google. Y!:La vérité sur l'affaire Free - Google. smarking:La vérité sur l'affaire Free - Google. magnolia:La vérité sur l'affaire Free - Google. segnalo:La vérité sur l'affaire Free - Google. gifttagging:La vérité sur l'affaire Free - Google.


Ecole numérique: attaquons-nous à la cause du problème, pas aux symptômes. 3 janvier 2013

Par Thierry Klein dans : Speechi.
Lu 3 fois | ajouter un commentaire

“Je vois deux approches extrêmes pour s’y prendre. L’une est celle du marteau et du burin, quand le problème posé est vu comme une grosse noix, dure et lisse, dont il s’agit d’atteindre l’intérieur, la chair nourricière protégée par la coque. Le principe est simple : on pose le tranchant du burin contre la coque, et on tape fort. Au besoin, on recommence en plusieurs endroits différents, jusqu’à ce que la coque se casse – et on est content.

Je pourrais illustrer la deuxième approche, en gardant l’image de la noix qu’il s’agit d’ouvrir. La première parabole qui m’est venue à l’esprit tantôt, c’est qu’on plonge la noix dans un liquide émollient, de l’eau simplement pourquoi pas, de temps en temps on frotte pour qu’elle pénètre mieux, pour le reste on laisse faire le temps. La coque s’assouplit au fil des semaines et des mois – quand le temps est mûr, une pression de la main suffit, la coque s’ouvre comme celle d’un avocat mûr à point ! Ou encore, on laisse mûrir la noix sous le soleil et sous la pluie et peut-être aussi sous les gelées de l’hiver.

Quand le temps est mûr c’est une pousse délicate sortie de la substantifique chair qui aura percé la coque, comme en se jouant – ou pour mieux dire, la coque se sera ouverte d’elle-même, pour lui laisser passage.”

Les lignes ci-dessus sont d’Alexandre Grothendieck, un des plus grands mathématiciens de l’histoire. Et sa parabole me fait penser à l’enseignement de l’informatique en France.

Depuis 30 ans qu’on a identifié nos faiblesses, on s’entête à tenter d’en enseigner les usages plutôt que d’enseigner la matière elle-même.

Les investissements visant à faire utiliser les technologies numériques par les élèves se multiplient (tableaux interactifs, classes numériques) mais, avant le niveau bac, les formations leur permettant de comprendre comment ces technologies sont développées sont presque absentes– je parle de cours de programmation, de génie logiciel, d’algorithmie et d’architecture des ordinateurs, bref, de tout ce que les anglo-saxons recouvrent sous l’appellation “Computer Science”.

L’informatique est devenue la science la plus importante pour résoudre les problèmes cruciaux qui se posent à l’humanité, du développement durable à la faim dans le monde (un exemple, en anglais). Elle est devenue un levier peut être plus important encore que les mathématiques pour toutes les sciences, de la biologie à la physique et sans doute même pour tout ce qui ne peut pas encore être appelé science et est appelé un jour à le devenir (une bonne partie des sciences humaines).

De tels enseignements sont devenus indispensables pour comprendre le monde qui nous entoure. Ils font partie de la culture générale que devrait avoir tout bachelier qui se destine à faire des études supérieures (avec – et non pas contre – le latin, la philosophie, les mathématiques…).

Il ne s’agit pas de créer une génération d’informaticiens, pas plus qu’il ne s’agissait de créer une génération de latinistes ou de mathématiciens. Simplement de créer des citoyens cultivés dans ce domaine, capables de comprendre et, pour les meilleurs, de créer les outils de demain.

On n’obtient pas cet effet en faisant utiliser des IPADs aux élèves, mais en leur expliquant comment ils sont faits.

Enseignez l’informatique le plus tôt possible à l’école, dès la sixième, et vous verrez que les problèmes récurrents et non résolus depuis 30 ans, fracture et retard numériques, absence de secteur numérique industriel digne de ce nom, absence de lien entre la recherche et l’industrie, tous ces symptômes sur lesquels on tape “au marteau et au burin” disparaîtront d’eux-mêmes au fil du temps sans qu’on s’en aperçoive, comme s’assouplit naturellement la si sympathique coque de noix de Grothendieck.

Très bonne année à tous.

Billets associés :
del.icio.us:Ecole numérique: attaquons-nous à la cause du problème, pas aux symptômes. digg:Ecole numérique: attaquons-nous à la cause du problème, pas aux symptômes. spurl:Ecole numérique: attaquons-nous à la cause du problème, pas aux symptômes. wists:Ecole numérique: attaquons-nous à la cause du problème, pas aux symptômes. simpy:Ecole numérique: attaquons-nous à la cause du problème, pas aux symptômes. newsvine:Ecole numérique: attaquons-nous à la cause du problème, pas aux symptômes. blinklist:Ecole numérique: attaquons-nous à la cause du problème, pas aux symptômes. furl:Ecole numérique: attaquons-nous à la cause du problème, pas aux symptômes. reddit:Ecole numérique: attaquons-nous à la cause du problème, pas aux symptômes. fark:Ecole numérique: attaquons-nous à la cause du problème, pas aux symptômes. blogmarks:Ecole numérique: attaquons-nous à la cause du problème, pas aux symptômes. Y!:Ecole numérique: attaquons-nous à la cause du problème, pas aux symptômes. smarking:Ecole numérique: attaquons-nous à la cause du problème, pas aux symptômes. magnolia:Ecole numérique: attaquons-nous à la cause du problème, pas aux symptômes. segnalo:Ecole numérique: attaquons-nous à la cause du problème, pas aux symptômes. gifttagging:Ecole numérique: attaquons-nous à la cause du problème, pas aux symptômes.