GoodAction, première entreprise altruiste ? 5 avril 2008
Par Thierry Klein dans : Entreprise altruiste.Lu 6 177 fois | 2 commentaires
Je vous ai récemment parlé de GoodAction, une régie publicitaire solidaire qui reverse l’argent généré par les bandeaux à des associations humanitaires. J’ai rencontré Guillaume et Laurent, les fondateurs lors d’une conférence que j’ai donnée sur le Capital Altruiste.
Actuellement, GoodAction est une association, ce qui freine son développement économique. La croissance est forte, l’association a besoin de moyens. Bref, GoodAction cherche à devenir une entreprise, augmenter son capital et il y aune forte chance pour que GoodAction devienne la première entreprise altruiste (et oui, avant celle que je suis en train de créer !)
Pour tous ceux qui s’intéressent au Capital Altruiste, j’ai fait une petite synthèse des différences entre les deux modes d’action: associatif ou entreprise altruiste.
| Associatif | Capital Altruiste |
Forme juridique | Association | Société privée (typiquement, SAS) |
Vitesse de développement | Limitée, basée sur le bénévolat uniquement | Accélérée car l’entreprise peut faire appel à du capital extérieur |
Champ d’action | Plutôt local | Global |
Mode de rétribution des ONG | Pourcentage du chiffre d’affaires (aujourd’hui, GoodAction reverse 100% de son revenu) | Pourcentage de capital (l’ONG à qui on donne détient une partie du capital de l’entreprise Altruiste).
Ceci n’exclut pas qu’un pourcentage du chiffre d’affaires soit aussi reversé à l’ONG, mais il restera toujours plus faible (en pourcentage) que si GoodAction était resté une association (en revanche, le chiffre d’affaires sera lui beaucoup plus important). |
Valeur du don à l’ONG au bout de 3 ans | 20 000 à 240 000 € | 3 à 7 millions d’euros |
Je vous fais une petite simulation. Si GoodAction reste sous forme associative, elle fera au mieux 300 000 euros de chiffre d’affaires dans 3 ans, et reversera environ 80% aux ONG partenaires, soit 240 000 € par an (hypothèse très optimiste). Pas mal !
Mais si GoodAction devient une société Altruiste, elle va lever 500 000 € de capital et donner 30% de sa structure aux ONG partenaires (on aura donc 45% pour les fondateurs, 25% pour les apporteurs de fonds, 30% pour les ONG). Dans 3 ans, GoodAction fera au moins 5 millions d’euros de chiffre d’affaires, 10 ou 20% étant reversé aux ONG, soit 500 000 à 1000 000 €. Encore mieux ! Mais la différence principale n’est pas là.
Avec un tel chiffre d’affaires, la valorisation financière de GoodAction sera de 10 à 20 millions d’euros. Les ONG partenaires détiennent donc, en capital, 3 à 6 millions d’euros (ce capital n’est pas forcément liquide, mais les ONG peuvent s’en servir comme garantie d’emprunt… Elles peuvent facilement, en allant voir une banque solidaire, emprunter 30 à 60% de la valeur pour financer des projets humanitaires).
Bref, d’un côté 240 000 € / an pour le monde altruiste (au mieux, et pour y arriver, les fondateurs devront probablement ramer, sans se payer, pendant 1 ou 2 ans). Ou 3 à 7 millions de l’autre, grâce à l’effet de levier apporté par la participation en Capital.
D’un côté, on se fait plaisir, on vivote ou peut-être, on galère. De l’autre, on change le monde.
Pour moi, il n’y a pas photo.
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1 litre de Volvic, 10 litres au Sahel: l’action humanitaire hypocrite.
Par Thierry Klein dans : Entreprise altruiste,General.Lu 9 106 fois | 2 commentaires
Vous avez dû entendre parler de cette action, où se fourvoie Véronique Jannot. Quelques chiffres…
Mettons qu’1 puits creusé au Sahel coûte 1000 euros et produise 100 litres d’eau par jour, soit 40 000 l / an environ. Mettons que Volvic ait considéré, dans ses calculs, la production du puits sur 10 ans, soient 400 000 litres d’eau, pour 1000 euros. Ceci fait 2 centimes d’euros, oui vous avez bien lu, deux centimes d’euros donnés par Volvic à chaque fois que vous achetez une bouteille d’eau.
Pour ce prix, Volvic:
- augmente de façon significative son chiffre d’affaires, puisque le slogan « 1 litre pour 10 litres » est extrêmement porteur et déclencheur d’achat.
- Acquiert une super-image solidaire. L’opération est menée et relayée par l’Unicef
- A des retombées énormes en publicité gratuite (passages télés, radios, collaboration gratuite et de bonne foi de multiples people, Véronique Jannot et même Laurent Ruquier, très complaisant lorsqu’il a présenté l’opération samedi soir. (1)
- Bénéficie d’un buzz très positif sur le Web (et probablement, stimule ce buzz – voir sur Doctissimo les messages à caractère publicitaire laissés par certains intervenants, qui me rappellent les techniques que Nespresso emploie sur le Web)
Alors évidemment, il sortira pas mal de puits au Sahel, du moins je l’espère, de tout ça. Mais le consommateur est floué, victime.
L’entreprise reçoit toujours, elle, plus qu’elle ne donne. Ce n’est plus vraiment un don, mais surtout une bonne affaire pour Volvic.
Une des raisons d’être du Capital Altruiste: supprimer l’hypocrisie du don, en le rendant structurellement quantifiable (en pourcentage de capital) pour chaque entreprise. Dans ce cas précis, Volvic pourrait au moins avoir un minimum de transparence et annoncer combien il donne pour chaque bouteille Volvic vendue.
(1) Sur les retombées, voir l’étude de cas de l’agence de communication de Volvic. L’Agence parle de « retombées exceptionnelles, multipliées par deux » et de « participation de véronique Jannot à des émissions clés du PAF (Le Grand Cabaret, La méthode Cauet, T’empêches tout le monde de dormir…) avec citation de la marque » .
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Bear Sterns: bénéfices privés et pertes publiques 24 mars 2008
Par Thierry Klein dans : General.Lu 3 774 fois | ajouter un commentaire
2 dollars ou 10 par action, peut-importe le montant de l’offre faite par JP Morgan pour racheter la Bear Sterns. Ce qui est grave, c’est que sur les 30 milliards de pertes potentielles, la Fed en garantit 29 – JP Morgan ne garantit « que » le premier milliard de pertes.
Mais, on l’oublie un peu en ce moment, ce ne sont que des pertes potentielles. Il est possible au final que les actions Bear Sterns valent 10, 20 ou 200 dollars – aujourd’hui personne ne le sait !
Et ce qui est déséquilibré, dans cette histoire, c’est que le citoyen américain assure le risque à 98%, sans aucun espoir de gain futur au cas où l’opération se révèlerait bénéficiaire. (Soit la Fed ne veut pas, pour des raisons idéologiques, prendre une participation, soit elle est tellement aux abois qu’elle en perd toute capacité de négociation).
Dans le monde capitaliste d’aujourd’hui, les pertes sont publiques et les bénéfices sont privés.
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Consommateurs de tous les pays, unissez-vous ! (A propos du boycott des jeux de Pékin)
Par Thierry Klein dans : Politique.Lu 5 343 fois | ajouter un commentaire
Quand mon fils refuse de se coucher le soir, il m’arrive de lui donner d’abord un petit bout de chocolat puis de menacer de l’en priver pour qu’il obéisse. C’est exactement ce que suggèrent tous ceux qui pronent le boycott des jeux de Pékin – on a fait un cadeau à la Chine, on menace de l’en priver pour faire pression.
Mais je doute que cela puisse avoir la moindre chance de succès. Mon fils a 2 ans et ne voit pas au delà du bout de chocolat; la Chine a des milliers d’années et voit loin. En fait, il est très confortable pour elle que la menace ne porte QUE sur les JO, c’est-à-dire sur un événement qui n’a aucune importance réelle.
Pendant ce temps, les « vraies » sanctions, celles qui pèsent et qui, dans notre monde globalisé, ne peuvent venir que des consommateurs, ne sont même pas évoquées.
Il serait de toutes façons injuste qu’on prive les sportifs de leur gagne pain alors que les citoyens-consommateurs – nous tous – sont incapables de prendre la moindre mesure de boycott de produits chinois. Seule une alliance entre tous les consommateurs du monde pourrait permettre de peser sur la politique chinoise : il faudrait pour cela que le consommateur réduise sa dépendance à son opium, la pub.
Consommateurs de tous les pays, unissez-vous !
(Je commencerais plutôt à boycotter les produits canadiens, à cause de ça, et les produits japonais, à cause de ça. Et un tel boycott aurait beaucoup plus de chance d’être efficace car les problèmes en cause sont de « petits » problèmes, en termes politiques et économiques… Les gouvernements céderaient très facilement face à des groupes de consommateurs assez nombreux et fermes).
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Good Action, Doona, alternatives humanitaires à Google. 19 mars 2008
Par Thierry Klein dans : Politique.Lu 6 771 fois | 1 commentaire
Je vous ai parlé, dans un billet récent, de la publicité comme « opium du peuple » – ou plutôt du consommateur. La Publicité nous pousse, par des moyens toujours plus performants et sophistiqués, à consommer toujours plus, ce qui rend le monde plus précaire, le travailleur plus dépendant et « esclave » de son côté consommateur – accessoirement la Publicité est aussi une des causes majeures de la croissance incontrôlée et partant, de la disparition des espèces animales, du réchauffement climatique.
Autre façon de dire la même chose, méfiez vous du gratuit quand il est financé par la publicité (Google, TF1, le Vélib)…
Lors d’une de mes interventions récentes sur le Capital Altruiste, j’ai rencontré Laurent et Guillaume, qui ont créé « Good Action« . Good Action est une régie publicitaire Web qui vous propose le même deal que Google (mettre de la publicité, mettre des liens sponsorisés sur votre site), sauf que l’intégralité de ses revenus sont reversés à des causes humanitaires et environnementales.
On est très proche, philosophiquement, du Capital Altruiste. Il s’agit à chaque fois d’utiliser la force de la mondialisation pour en corriger les effets, en se dotant d’une force de frappe économique.
Même chose chez Doona, un moteur de recherche humanitaire, comme Google sauf que les bénéfices de liens apparaissant dans les pages de résultat vont vers des causes humanitaires.
GoodAction et Doona ne sont encore que des « startups humanitaires », mais Google a mille fois plus à craindre, à terme, de ce genre d’initiatives que de Yahoo, Microsoft, (sans même parler du grotesque Quaero)… Même la technologie ne peut pas grand chose contre les forces de l’esprit.
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Quiconque sauve une vie sauve l’Univers tout entier… et si c’était vrai pour les animaux ? 29 février 2008
Par Thierry Klein dans : Animaux.Lu 60 543 fois | 3 commentaires
« Quiconque sauve une vie sauve l’Univers tout entier »… Je vous ai déjà parlé de cette devise du Talmud, qui figure sur la médaille des Justes de l’Institut Yav Yashem.
De plus en plus de voix s’élèvent pour signifier que le traitement fait aux animaux est une insulte à l’Humanité tout entière.
J’ai déjà plusieurs fois cité les magnifiques textes de Romain Gary dans ce blog (« Voir dans les animaux plus que de la viande et de la peau est un acquis culturel, tout comme la beauté…Ai-je besoin de rappeler au lecteur le massacre des bébés phoques en Norvège ?…Il est on ne peut plus clair que c’est autant l’Homme – et oui, avec un H majuscule – qu’on assassine qu’un phoque.« ).
J’ai aussi écrit sur le parti-pris « anti-anthropomorphique » de la communauté scientifique, qui repose essentiellement sur une interprétation biaisée des expériences de Pavlov, et masque opportunément l’absence de justification éthique réelle du traitement inhumain que nous faisons subir aux animaux.
Ce qui est nouveau, c’est que de grands scientifiques, comme Jane Goodall (quel beau nom ! ) communiquent sur ces thèmes de l’identification profonde de l’homme à l’animal, matières souffrantes, dont découle logiquement l’idée que maltraiter les animaux, c’est attaquer l’Humanité tout entière.
Je cite Jane Goodall (via Le Monde du jour – interview à lire en entier, absolument !):
Sur le caractère consubstanciel de la souffrance de l’homme et de l’animal
« Ils [les hommes] pourraient s’interroger sur l’élevage et l’abattage de masse, se demander quelle philosophie justifie toutes ces souffrances. Pensez à ce qu’est la vie d’une vache, élevée en prison, piquée aux hormones, s’effondrant sur elle-même, souvent envoyée à l’abattoir consciente, écorchée vive.
– Ecorchée vive ?
– Je n’invente rien. De nombreux animaux meurent dans des conditions effroyables, dépecés encore vivants, lisez le reportage de Gail A. Eisnitz sur les abattoirs de Chicago [Slaughterhouse : the Shocking Story of Greed, Neglect, and Inhumane Treatment Inside the US Meat Industry, Prometheus Books, 1997]. Avez-vous déjà approché une vache ?
Enfant, j’allais à la ferme de ma grand-mère dans le Kent. Les vaches répondaient à leur nom, nous connaissions la personnalité de chacune, le troupeau paissait dans un pré de trèfles, changeait de pâturage. Ensuite, nous y mettions les cochons qui retournaient la terre, dévoraient les bouses, éliminaient bactéries et parasites. J’adore les cochons. Ce sont des bêtes très intelligentes, joueuses, affectueuses, comme les chiens. Quand on pense qu’ils sont enfermés dans des porcheries minuscules où règne une odeur infernale, alors qu’ils possèdent un odorat extrêmement fin ! En mangeant tous ces animaux, qui ont longtemps été nos dieux, nos proches, nous mangeons leurs souffrances, nous incorporons les tortures qu’ils subissent. Je ne peux pas l’oublier. »
De la façon dont l’homme traite les animaux, il traitera les humains
« Prenez les premières chaînes de montage des usines Ford, elles ont été copiées sur le modèle des abattoirs. Ce n’est pas par hasard. » parcelliser les opérations d’écorchage concentrait les employés sur une activité mécanique – qui leur évitait toute réflexion. On n’abattait plus des bêtes, on abattait un travail. Sans état d’âme. En appliquant ces méthodes aux humains, Henri Ford a inauguré les « temps modernes » décrits par Chaplin. L’ère industrielle qui a déshumanisé le travail – et le travailleur.
Dès que nous ne considérons plus les humains comme tels, nous les traitons, dit-on, comme des animaux . Or, traiter sans aucune compassion les animaux, les considérer comme des objets industriels et plus comme des espèces souffrantes, est déjà une cruauté indéfendable.
Je suis complètement d’accord avec ça. J’écrivais il y 3 semaines ces quelques mots, qui, outre le fait qu’ils n’ont pas pris une ride, m’apportent la satisfaction narcissique de me citer moi-même
« Outre qu’elle y perd toute notion de respect de soi et de dignité, l’espèce humaine est en train de mourir de cette capacité à mettre toute émotion de côté pour agir de façon dite « rationnelle » ou « matérialiste ». Les génocides du XXème siècle, le réchauffement climatique, le massacre des phoques n’ont pas d’autre cause.
Essayons les émotions, pour changer. »
Je vous renvoie aussi à mes 3 billets « La préservation des animaux: urgence et éthique » sur le sujet. Je viens de les relire 2 ans après, à froid, et à mon grand étonnement, je ne me suis pas ennuyé une seconde. J’ai même appris des choses !
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Conférence Economie Solidaire chez Déclic, le 28 février à 18h 28 février 2008
Par Thierry Klein dans : Entreprise altruiste.Lu 5 209 fois | 2 commentaires
Pour ceux qui veulent en savoir un peu plus sur le Capital Altruiste, ce sera ce soir, à 18h, chez Declic. Entrepreneur TIC et économie sociale et solidaire
… il existe des façons d’entreprendre qui ont recours au même vocabulaire et qui sont plutôt confidentielles.
A partir d’exemples concrets et du vécu de leurs dirigeants, venez découvrir ces formes originales d’entreprises qui donnent un sens particulier à leurs projets.
Introduction: profils de l’entrepreneur « Alternatif »
La coopérative d’activité et d’emploi, accueil du créateur,aide au démarrage
Microclear: formation et dépannage informatique
alterna: hébergement et portage de projets
Graines d’affaires: coopérative d’activité et d’emploi
La société coopérative d’intérêt collectif
Cliss XXI: expertise, assistance, formation, accompagnement sur les logiciels libres
La société coopérative de production
Insite: agence d’accompagnement de projets internet-extranet
Anis: favoriser l’internet solidaire
Une nouvelle entreprise coopérative sur EuraTechnologies
Coop-Euratec: cabinet d’experts en téléphonie, Internet, plateforme relation clients pour les PME
La société « humanitaire »
Association capital altruiste: comment concilier profit et bien commun?
Cette conférence sera animée par Microclear, Alterna, graines d’affaires, Cliss XXI, Insite, Anis, Coop-Euratech, Speechi
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Si ce site avait existé pendant la guerre, qu’en aurait-il été des dénonciations de juifs ? 13 février 2008
Par Thierry Klein dans : Humeur.Lu 3 867 fois | 1 commentaire
C’est une phrase tirée de l’interview de Carla Bruni dans l’Express – j’ai déjà dit que je trouvais cette interview remarquable. J’étais en voiture aujourd’hui et évidemment, toutes les radios (Europe, RMC…) condamnaient cette phrase. C’était une « imbécillité », « une vraie méchanceté ». « Elle ose se comparer aux juifs sous l’occupation, ça n’a rien à voir ! »… Dans le meilleur de cas, on accorde des circonstances atténuantes parce que « Carla Bruni n’est pas encore dans son rôle de première dame (sic !) » ou « sa parole a dû dépasser sa pensée ».
Mais, c’est une interview lue et relue. Qui plus est, pour écouter non seulement la radio mais aussi, parfois, les textes des chansons de Carla Bruni, je suis persuadé qu’elle s’exprime à peu près 100 fois mieux que le journaliste radiophonique de base (surtout que maintenant, sur Europe, on mesure en Morandinis).
Enfin, je ne trouve pas la comparaison scandaleuse.
Ce qu’on reprocherait à un site de dénonciation de juifs sous l’occupation, ce n’est pas de donner une information fausse – un tel site donnerait probablement de vraies listes. C’est avant tout de donner une information dont la nature même est infâme – et c’est bien ce qu’a fait le Nouvel Observateur, je me suis déjà exprimé là dessus.
Non seulement donc cette comparaison n’est pas scandaleuse, mais il est extrêmement significatif du mal qui a été fait que Carla Bruni, contrairement à l’avocat de Sarkozy, condamne la nature de l’information et non pas sa réalité.
Dans son expression, elle n’élimine pas la part du doute – rien que pour ça, la faute morale du journaliste est immense.
Enfin, je note que Carla Bruni, qui pour moi n’a rien dit de mal ni d’excessif s’est excusée aujourd’hui d’avoir pu blesser quelqu’un, alors que le Nouvel Observateur, qui a commis une vraie saloperie ne l’a toujours pas fait…
Ajout 13/2/2008: Jean Daniel, directeur du Nouvel Obs, n’admet ce soir qu’une « erreur » du journal. Mais « Nicolas Sarkozy, a jeté lui-même sa vie privée en pâture…On ne parvenait donc pas à éprouver pour lui le respect que nous avions eu pour d’autres présidents …Et c’est là, disons-le, que nous avons eu tort ».
Autrement dit, il justifie « l’erreur » du Nouvel Obs par le côté a priori indigne de la personne mise en cause ! C’est vraiment bien confortable de pouvoir s’exonérer de la sorte.
Et j’ai déjà vu JD écrire des analyses moins alambiquées, et adopter des positions moins byzantines.
Quand aux directeurs de la Rédaction, dans un billet qui atteint des summums d’hypocrisie, ils affirment que leur comportement a été en quelque sorte « induit » par celui de Sarkozy dont « l’inconstance politique rivalise avec le barnum privé » et qui leur aurait même « tendu un piège ».
L’envie, toujours l’envie….
Ils s’offusquent alors, comme presque toute la presse écrite et radio, que Sarkozy ait osé attaquer au Pénal: « notre journaliste est aujourd’hui passible de trois ans de prison … Or, nous le savons, Airy Routier n’est pas un faussaire ». (Brillante démonstration !)
(Que toute la presse feigne d’ignorer que cette peine de 3 ans n’a aucune chance d’être prononcée a un côté vraiment consternant).
Tout ça finit par un méli-mélo moralisateur, grandiloquent et surtout peu clair sur le rôle de la Presse et sur sa grandeur, sur « le privé qui sert de couverture aux hommes publics » en conséquence de quoi « il nous faut collectivement revisiter le paysage médiatique et les décombres des fortifications qui protégeaient l’intimité depuis la loi du 17 juillet 1970 »
Toute cette clique ferait bien de prendre quelques leçons d’écriture en relisant l’interview de Carla Bruni. Heureusement, dans l’ensemble, les réactions des lecteurs du Nouvel Obs sont bien plus dignes que celles des rédacteurs ou de Jean Daniel.
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Sur l’interview de Carla Bruni dans l’Express 12 février 2008
Par Thierry Klein dans : Humeur.Lu 4 172 fois | ajouter un commentaire
Tout est remarquable dans cette interview , tout, sauf la vidéo ridicule et longuette, pompeusement intitulée « making-of » de Christian Barbier – qui, sur ce coup, me fait irrésistiblement penser à Dick Thornburg (vous savez, le reporter couard et obséquieux de Die Hard 2).
En voilà une qui n’aura pas besoin de Guaino pour s’exprimer et franchement, c’est tant mieux.
A part ça, c’est clair que c’est l’envie qui inspire presque toutes les réactions sur cette histoire…Si Carla avait été un peu moins jolie, un peu moins douée, on aurait certainement reproché beaucoup moins de choses à Sarko.
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10000 € ou bien mon bébé abat ce cobra
Par Thierry Klein dans : Animaux.Lu 3 314 fois | ajouter un commentaire Billets associés :
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