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Progressisme et obscurantisme 15 juin 2020

Par Thierry Klein dans : Covid-19.
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Quand on croit que l’instruction se résume à la transmission de « codes » servant inconsciemment la reproduction sociale (Bourdieu), il est alors facile de croire que la science ne repose que sur des règles formelles, partagées par les « experts » (ceux qui ont les fameux codes) et dont le consensus forme la vérité. On est alors à 2 doigts déjà de croire que la science n’est qu’une « méthode ». De confondre le respect des règles et du protocole avec la vérité. On a une vision formelle, presque militaire de la science.

En vérité, une telle opinion est un abaissement de la notion même de science et de vérité. L’obscurantisme est inscrit dans le progressisme moderne (j’appelle ainsi la déconstruction), alors qu’il se pense scientifique.

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Les essais randomisés ne sont pas la panacée pendant les épidémies

Par Thierry Klein dans : Covid-19.
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Un petit papier de l’IHU Marseille avec un exemple historique intéressant :

5 patients ont prouvé au départ l’efficacité de la pénicilline.

« Quand même des données scientifiques imparfaites montrent un effet positif trivialement évident (« obvious »), il n’est pas éthique de réaliser un essai randomisé parce qu’il met les malades devant l’alternative de ne pas être soignés (groupe de contrôle) ou d’être soignés avec une molécule efficace.

Il a fallu 5 patients à Sir Edward Abraham pour démontrer définitivement que la pénicilline sauvait 100% des patients atteints de staphylocoque ou de streptocoque.

Aujourd’hui,il ne viendrait évidemment à l’idée de personne de tester l’efficacité de la pénicilline sur les pneumonies à pneumocoque contre un placebo. »

Le choix de cet exemple n’est pas anodin. Pour rappel, Raoult s’est décidé sur 6 patients pour sa bithérapie, patients pour lesquels il a observé une annulation de la Charge Virale en 5 jours, événement au départ improbable puisque cette CV est censée mettre 10 à 15 j pour s’annuler sans traitement.

Je rappelle que si on prend un dé, tomber sur le 6 est un événement improbable qui a 17% de chances de se réaliser. Si vous lancez 6 fois un dé, il y a 1 chance / 47 000 qu’il tombe 6 fois de suite sur le 6.

Si cela se passe et que vous êtes un scientifique digne de ce nom, vous DEVEZ conjecturer que le dé est pipé. Dans le cas de Raoult, même chose. Il DEVAIT conjecturer un lien entre sa bithérapie et la baisse observée de la CV, tenter de soigner sur cette base tout en confirmant expérimentalement son observation initiale « au fil de l’eau ». Je ne peux même pas comprendre comment, en raison, ceci peut lui être reproché.

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Méthode et génie chez Diderot

Par Thierry Klein dans : Covid-19.
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« Vous ne soupçonnez pas combien je fais peu de cas de la méthode et des préceptes. Celui qui a besoin d’un protocole n’ira jamais loin. Les génies pratiquent beaucoup et se font d’eux-mêmes »

Le Neveu de Rameau, Diderot – encore un populiste.

Dans la pensée 30 de l’Interprétation de la nature, Diderot est encore plus explicite:

 » La grande habitude de faire des expériences donne aux manoeuvriers d’opérations les plus grossiers un pressentiment qui a le caractère de l’inspiration. Il ne tiendrait qu’à eux de s’y tromper comme Socrate, et de l’appeler un démon familier. Socrate avait une si prodigieuse habitude de considérer les hommes et de peser les circonstances, que dans les occasions les plus délicates, il s’exécutait secrètement en lui une combinaison prompte et juste, suivie d’un pronostic dont l’événement ne s’écartait guère. Il jugeait des hommes comme les gens de goût jugent des ouvrages d’esprit, par sentiment. Il en est de même en physique expérimentale de l’instinct de
nos grands manoeuvriers. Ils ont vu si souvent et de si près la nature dans ses opérations, qu’ils devinent avec assez de précision le cours qu’elle pourra suivre dans les cas où il leur prend envie de la provoquer par les essais les plus bizarres.

Ainsi le service le plus important qu’ils aient à rendre à ceux qu’ils initient à la philosophie expérimentale, c’est bien moins de les instruire du procédé et du résultat, que de faire passer en eux cet esprit de divination par lequel on subodore, pour ainsi dire, des procédés inconnus, des expériences nouvelles, des résultats ignorés. « 

Et aussi, toujours Diderot (Lettre à Sophie du 20 octobre 1760)

« Il s’agissait entre Grimm et M. Le Roy du génie qui crée et de la méthode qui ordonne. Grimm déteste la méthode ; c’est, selon lui, la pédanterie des lettres. Ceux qui ne savent qu’arranger feraient aussi bien de rester en repos ; ceux qui ne peuvent être instruits que par des choses arrangées feraient tout aussi bien de rester ignorants. « Mais c’est la méthode qui fait valoir. — Et qui gâte. — Sans elle, on ne profiterait de rien. — Qu’en se fatiguant, et cela n’en serait que mieux. Où est la nécessité que tant de gens sachent autre chose que leur métier ? « 

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Les erreurs méthodologiques des opposants au traitement Raoult: une synthèse. 3 juin 2020

Par Thierry Klein dans : Covid-19.
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Dans l’immense majorité des maladies, aujourd’hui, on compare un nouveau traitement à un traitement existant. Et les gains des nouveaux traitements sont assez faibles (quelques % gagnés sur un cancer, c’est déjà énorme, cela peut sauver des millions de vies). On est alors dans une recherche de gain « asymptotique », qui n’est observable empiriquement par aucun médecin puisqu’il faut des échantillons énormes pour le confirmer statistiquement (pouvant aller jusqu’à plusieurs milliers de patients, sur plusieurs années). Dans un tel contexte, pour obtenir une telle précision, une étude randomisée, avec bras de contrôle et placebo, est non seulement la meilleure façon mais parfois la seule façon de montrer l’efficacité d’un traitement. (Ceci ne résout en rien le problème éthique, à mon avis extrêmement sérieux, mais je le mets de côté dans le cadre de cette discussion).

La médecine étant malade des affaires, et moralement traumatisée par l’afflux des moyens financiers introduits par les labos et la pression qu’ils font peser sur les esprits, les études « randomisées », ayant pour objet de minimiser le « biais d’intérêt » des chercheurs sont rassurantes pour tous, chercheurs compris, puisqu’elles les absolvent, au moins en apparence, du fameux biais « d’intérêt ». (Elles sont loin d’annuler ce biais mais là aussi, je mets ce point de côté dans le cadre de cette discussion). Reconnaître ce biais d’intérêt n’est pas complotiste en soi. La balance de la raison est une machine très délicate, que l’intérêt personnel dérègle facilement. Le biais introduit par l’argent dans le cerveau des chercheurs peut être conscient aussi bien qu’inconscient.

Dans le cas d’un nouvelle maladie infectieuse, le contexte expérimental est radicalement différent:

– on compare un traitement non pas à un autre traitement existant, mais à une absence de traitement. Les gains attendus sont donc le plus souvent d’un ordre de grandeur supérieurs au cas classique. Si je prends l’événement observé dans l’étude 1 Raoult, « baisse de la charge virale (CV) en 5 j » (alors que 10 à 20 j sont normalement attendus selon la littérature disponible), l’observation de cet événement 6 fois sur 6 suggère une probabilité de succès supérieure à 95%, c’est énorme.

– Du fait de ces taux de succès « tout ou rien », l’effet du traitement est observable sur des petites séries, accessible à l’observation empirique. Le cas extrême est Pasteur avec la rage: échantillon de 1 suffisant pour la « preuve ». Les effets placebo, biais d’observation, etc… existent mais on peut quand même supposer qu’ils ne touchent pas 100% des malades, ce sont des biais qu’il faut toujours considérer relativement au gain du traitement. Ils sont d’autant plus négligeables que le gain du traitement est fort. Imagine-t-on sérieusement, ici, que 95% à 100% des malades ont annulé leur CV en 5 jours grâce à l’effet placebo ? Dans ce cas, parler à propos de Raoult de « gourou marseillais » serait en effet tout à fait approprié !

– Hypothèse: dans le comportement rassurant et outrageusement affirmatif de Raoult, dans ses déclarations, il me semble évidemment y avoir la volonté de créer de l’effet placebo. Je m’étonne que personne ne mentionne ceci. Raoult s’exprimant dans la presse est un médecin qui communique et donc, par définition, un placebo en action autant ou même plus qu’un scientifique.

– la maladie infectieuse aura un cycle de quelques mois seulement, durée probablement inférieure ou égale à celle nécessaire pour réaliser l’étude randomisée avec placebo. Une telle étude est en effet longue et complexe à réaliser – de fait, à ce jour, personne ne l’a réalisée en dépit de multiples et coûteuses tentatives européennes (mais étaient-elles vraiment des tentatives ?). Donc si on pense avoir trouvé un traitement, on a intérêt à l’appliquer au plus tôt parce que le gain lié à la preuve formelle sera nul. Quand on aura obtenu cette preuve formelle, la maladie aura disparu (alors que dans le cas d’un cancer, la preuve permet de sauver des millions de gens, elle n’en sauvera aucun dans le cas du covid, en tous cas cette année). On est alors dans un cas où la recherche de la preuve scientifique formelle s’oppose à l’intérêt du malade. Dans ce cas, le médecin doit, me semble-t-il, rechercher l’intérêt du malade.

– Raoult a donc trouvé un traitement qui marche probablement. Son hypothèse de travail est que l’annulation de la CV, à un stade peu avancé de la maladie, signifie guérison. Cette hypothèse a été très critiquée mais par des gens qui n’ont jamais le quart de la moitié de l’expérience clinique de Raoult sur ce sujet précis – or c’est typiquement le type même du raccourci scientifique qu’on ne peut faire que si on a accumulé une grosse expérience clinique (pratique). Un peu comme le pilote de F1 qui après un tour de piste indique aux mécanos qu’il y a sans doute un problème au niveau du 3ème piston (1). La preuve formelle n’est pas apportée mais ça marche. Il sait de plus que son traitement, avec le suivi nécessaire (j’insiste sur ce point tant il semble y avoir eu de bourrinage sur la HCQ dans les hôpitaux américains et parfois français), est sans risque. Il fait donc le choix de traiter et de continuer à faire très attention et à observer, évidemment. Il confirme « en continu » ses observations, au fur et à mesure. Quotidiennement, il sort des données qui lui permettent de confirmer son observation et son hypothèse initiales. Pas totalement, d’ailleurs. On voit dans son étude 3 qu’il s’est partiellement trompé, puisque certains patients guérissent sans baisse de la CV (son groupe pVir) et que d’autres meurent alors que la CV a normalement baissé (groupe pClin). Le groupe Pvir n’est pas confondu avec le groupe Pclin comme il aurait dû l’être si son raisonnement avait été parfaitement correct. Mais ce phénomène (qu’il ne prétend pas expliquer) est resté suffisamment peu fréquent pour que le traitement garde son intérêt.

Cette approche est rationnelle, quoi qu’en disent ses détracteurs. Cela n’a rien d’une confiance aveugle en ses moyens, d’une attitude mégalomaniaque ou d’une croyance. En l’absence de preuve formelle, on doit choisir la solution qui probablement maximise l’intérêt du patient. Et si on pose les gains sur le papier, il est probable qu’on aurait sauvé 50 à 75% des morts français en procédant ainsi.

En complément un point. La facilité avec laquelle Raoult semble avoir trouvé quelque chose qui fonctionne, presqu’au premier essai, plaide en faveur de la découverte d’autres solutions antivirales mettant une pression suffisante sur le virus pour avoir un effet. Il est probable que si on tente de façon pas trop débile, on obtiendra des résultats dans cette histoire. A Hong Kong, une multithérapie ayant des effets positifs semble avoir été trouvée aussi. Il semble aussi qu’aux USA, l’ajout de Zinc améliore le traitement. Bref, ceux qui ont cherché ont trouvé. Il est dommage qu’au nom de la science (à mon avis mal comprise), on retarde l’effet positif des découvertes.Si plusieurs traitements sont efficaces, et que l’épidémie revient, ce qui n’est pas certain, une étude randomisée, en double aveugle pourrait être nécessaire alors pour les hiérarchiser entre eux (puisque la différence d’efficacité entre les traitements serait alors difficilement observable « à l’œil nu ». Le risque pris par le groupe de contrôle serait bien moindre car on comparerait 2 traitements qui fonctionnent.


(1) autre exemple peut être plus parlant (problème que je viens de voir sur YouTube). En maths, si je regarde l’intégrale de 0 à l’infini de sin(x) / x dx, je « vois » en 1 seconde qu’elle converge, je peux l’affirmer sans crainte de me tromper. Mais j’ai besoin de beaucoup plus de temps, quelques minutes à une heure peut être, pour le prouver (je pense voir déjà comment je vais m’y prendre mais ai besoin d’un papier et d’un crayon pour le poser) et sans doute de plus d’une heure pour trouver sa valeur exacte (je ne vois pas comment je vais faire). Le raccourci qui me permet de voir en 1 seconde, sans avoir établi la preuve, que l’intégrale converge ne pourra être fait par un élève de première ou de terminale facilement, il devra voir la preuve pour me croire. Je suis à peu près aux élèves de première ce que Raoult est aux journalistes scientifiques ou aux critiques « méthodologistes »non experts dans son domaine, fussent-ils médecins ou chercheurs.

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