Pourquoi un sac de jute, au mur, dans mon bureau ? 31 janvier 2008
Par Thierry Klein dans : Humeur.Lu 19 319 fois | 16 commentaires
Depuis des années, il n’y a rien sur les murs de mon bureau, à part ce sac de jute. Pourquoi ? Vous le saurez en lisant le témoignage que mon père vient d’envoyer à Yad-Vashem, pour que Mr Mandon, Minotier à Lamastre, puisse recevoir sa décoration.

« Je suis l’enfant unique de Pierre Klein et de sa femme Simone.
Mon père est né en Alsace en 1900 à Fegersheim et ma mère en 1912 à Bar le Duc.
A l’époque de la guerre nous habitions à Marseille (367 Avenue du Prado) et mon père était directeur de la société Weill et Cie (filature et tissage de jute). En 1942 un administrateur provisoire a remplacé mon père et c’est à cette époque que nous avons quitté Marseille pour Lamastre (Ardèche). Mon père connaissait déjà Emile Mandon qui était un de ses clients. C’est lui qui a proposé de nous héberger à Lamastre.
Mon père pourtant très méfiant savait qu’il pouvait avoir confiance en lui.
J’ai donc été réfugié à Lamastre de 1942 à 1945. J’étais à l’époque très jeune puisque je suis né en 1935 mais je me souviens parfaitement des faits suivants :
En 1942, mon père et ma mère (Pierre Klein et Simone Klein née Alphen) , mon oncle, ma tante et leur fils(Ernest Klein, Alice Klein née Levy et Etienne Klein , ma grand mère et mon grand père maternels (Armand Bernheim et Germaine Bernheim née Lehmann) ; ma grand-mère paternelle (Rose Klein née Levy) ainsi que des amis de mes parents (Pierre et Francette Montus), Françoise Maous et son mari avons été accueillis par Monsieur et Madame Mandon.
Pendant ces trois années ils nous ont nourris, secourus, réconfortés, entourés avec la plus grande bienveillance.
En 1943, une rafle a eu lieu à Lamastre. Au cours de cette rafle une dizaine de juifs ont été arrêtés dont Francoise Maous et son mari.
Le jour de cette rafle alors que sans le savoir ma mère et moi allions nous jeter dans la gueule du loup sur le lieu de l’arrestation ; Monsieur Mandon a couru à perdre haleine derrière nous pour nous rattraper et nous prévenir : « Madame Petit, Madame Petit (nom d’emprunt de ma mère pendant la guerre), vous avez oublié vos courses chez moi ».
Nous étions à 100 mètres des allemands et avons immédiatement rebroussé chemin. Nous étions sauvés.
Une autre fois, alors que des allemands et des miliciens s’étaient rendus à Lamastre, Monsieur Mandon est venu d’urgence prévenir le Directeur de l’école primaire qu’il fallait mettre immédiatement à l’abri les deux élèves Etienne et Francis Klein. Le Directeur nous a emmenés dans les bois et j’ai été ainsi sauvé une deuxième fois.
Suite à tous ces évènements, mon père décida d’exiler sa famille à Gap occupé alors par l’armée italienne qui lui semblait moins dangereuse que l’armée allemande.
C’est encore Monsieur Mandon qui nous transporta avec sa voiture personnelle dans les Hautes Alpes et ce au péril de sa vie et de celle de sa famille. Il nous a fait franchir la ligne de démarcation pour passer en zone libre. Puis après la capitulation italienne, Gap fut occupé par les allemands. C’est encore Monsieur Mandon qui une fois de plus risqua sa vie pour nous rechercher quelque temps plus tard et nous ramener à Lamastre.
Nous étions présentés aux gens du village comme étant des réfugiés venant de Marseille.
Les relations entre la famille Mandon et mes parents étaient quotidiennes : mon père travaillait comme comptable à la minoterie avec Monsieur Mandon. Leur entente a été parfaite pendant ces trois années. Ma mère passait beaucoup d’après midi avec Madame Mandon.
Moi-même j’étais ami avec Pierre Mandon (le fils), et ses sœurs Janine et Marinette.
Il n’a jamais existé aucun arrangement financier entre la famille Mandon et mes parents.
La motivation de Monsieur Mandon était essentiellement d’ordre humanitaire : il désirait porter secours à des familles persécutées.
N’oublions pas que cette ville de Lamastre est toute proche du Chambon sur Lignon qui a été reconnu comme Village des Justes. Beaucoup d’habitants de Lamastre, comme ceux du Chambon sur Lignon ont eu pendant la guerre ce comportement admirable, agissant simplement parce qu’il fallait le faire, sans compensation, sans forfanterie, sans gratification. C’était naturel, un point c’est tout. Et les Mandon sont des personnes de cette trempe qui n’ont jamais cherché à se glorifier de leurs actions.
Voila les raisons pour lesquelles je souhaiterais vivement que Monsieur Mandon aujourd’hui décédé (mais dont les trois enfants sont encore en vie), puisse recevoir à titre posthume la médaille des Justes. Il me semble en effet important que ses enfants et petits enfants gardent dans leur mémoire l’histoire exemplaire de leur père et grand père pendant la dernière guerre et qu’ils en conservent un témoignage officiel.
A la fin de la guerre, 1945 ou 1946, nous avons quitté Lamastre pour retourner à Marseille, mais les liens entre la famille Mandon ne se sont pas perdus. Mes parents écrivaient à Monsieur et Madame Mandon environ deux fois par an et moi même après mon mariage en 1960, je suis allé leur présenter ma femme.
J’ai revu Pierre Mandon ainsi que ses deux sœurs trois fois au cours de ces deux dernières années.
Pourquoi avoir mis aussi longtemps à demander cette distinction ?
J’ai ignoré l’existence de cette décoration pendant de nombreuses années. En regardant à la télévision la cérémonie organisée par Monsieur le Président de la République, Jacques Chirac au Panthéon, je me suis dit que j’étais le dernier à avoir vécu ces événements douloureux et qu’une fois disparu, tous ces faits passeraient dans l’oubli, et qu’il n’était pas trop tard pour réparer cette injustice. »
Francis Klein
Qui sont les Justes ? (Quiconque sauve une vie sauve l’Univers tout entier).
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Le complexe du saumon 7 décembre 2007
Par Thierry Klein dans : Humeur.Lu 5 313 fois | 2 commentaires
Saisi d’une soudaine démangeaison des testicules, le Grand Saumon, au soir de sa vie, retourne à grand peine sur son lieu de naissance. Pour ce faire, il va parcourir des milliers de kilomètres, remonter le courant de son torrent natal, franchir des cascades de plusieurs mètres- parfois même des barrages – en donnant d’énormes coups de queue dont la plupart de mes congénères de génotype XY sont bien incapables, quoi qu’ils disent.
Une fois arrivé en haut, il se reproduit, change d’aspect et meurt en quelques jours.
Chez mes congénères, le processus de vieillissement est ralenti (nous vivons plusieurs dizaines d’années après la phase de reproduction), mais la logique reste la même : après avoir dupliqué notre patrimoine génétique, nous nous épuisons à élever notre progéniture, puis nous mourrons. On ne redescend plus jamais la rivière.
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La dépression, maladie honteuse dont la mort est le vecteur 9 octobre 2007
Par Thierry Klein dans : Humeur.Lu 10 374 fois | 9 commentaires
6000 personnes se suicident en France tous les ans à la suite d’une dépression. Non avouée, même (et surtout !) à soi-même, non remarquée par l’entourage, non soignée, la dépression est, bien avant la chtouille et le SIDA, la dernière maladie honteuse de notre siècle et son côté honteux provient de l’absence même de tout microbe, de toute cause physiologique externe qui puisse servir d’excuse à la maladie.
Alors que pour les maladies infectieuses, la mort met fin à l’épidémie, le suicide répand le mal dans le cas de la dépression. Dans certaines familles, le suicide est presque une habitude de nature tragique (ou génétique ?). Dans tous les cas, l’entourage est terriblement et durablement fragilisé.
L’amélioration de la sécurité routière permet de gagner 5000 vies par an. Pour la dépression, les radars à installer sont personnels. Il faut avant tout que le malade identifie la nature de son état et consulte.
Ecouter l’interview du Pr Rouillon sur Europe 1 et voir le site de la campagne anti-dépression qui vient d’être lancée en France.
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Web 2.0 : la grande beta-isation des esprits. 24 mai 2007
Par Thierry Klein dans : Humeur.Lu 5 421 fois | 1 commentaire
Merci au Journal du Net pour avoir publié une version – un peu édulcorée – de ce billet… Je vous livre ci-dessous la version originale.
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L’effet papillon 10 mai 2007
Par Thierry Klein dans : Humeur.Lu 4 245 fois | ajouter un commentaire
Des cancers rares de la gorge liés à la fellation
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La course du rat 18 février 2007
Par Thierry Klein dans : Humeur.Lu 6 705 fois | 9 commentaires
Après 15 jours d’une chasse intensive (les rats refusaient le poison), j’ai finalement réussi à capturer 5 rats ce week-end, dans une cage à loir !
Comme j’étais incapable de les noyer, j’ai été les relacher en forêt à 500 m de chez moi. Mon beau-père, qui est un spécialiste, dit qu’un rat retrouve toujours son chemin. Vous y croyez ?
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Quel déchet ! 6 novembre 2006
Par Thierry Klein dans : Humeur.Lu 4 680 fois | 3 commentaires
Je parle souvent des positions opportunistes et souvent raccoleuses prises par les hommes politiques sur les sujets écologiques.
Le summum a été atteint ce week-end quand Fabius a déclaré que Nicolas Hulot ferait un excellent numéro 2 pour son gouvernement.
Ca n’a évidemment aucune chance de se faire, sauf si Nicolas Hulot se rend compte en lisant ses fiches que le Fabius est sur la liste des espèces menacées.
En contrepoint, il y a eu Ségolène Royal qui a déclaré le combat de José Bové « honorable » avec – quand même – un bémol sur l’atteinte au doit de propriété – sans doute pour le côté ordre juste…
En point d’orgue, son souhait d’un moratoire sur les condamnations liées aux délits de type « OGM », qui doit sonner aux oreilles de José Bové comme un petit chantage.
Le ralliement de la deuxième gauche vaut-il qu’on perde son âme ?
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Les Courjault nient toujours être les parents des bébés décédés 11 octobre 2006
Par Thierry Klein dans : Humeur.Lu 4 400 fois | 3 commentaires
Pourtant, l’ADN prouve le contraire.
On va descendre dans le sordide (miam !) parce que la femme est forcément au courant, alors que l’homme peut être de bonne foi.
Ajout 12/10/2006: Elle a avoué, ça y est.
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Qu’y a-t-il après la Coupe du Monde ? 11 juillet 2006
Par Thierry Klein dans : Humeur.Lu 4 901 fois | 1 commentaire
Je ne sais pas pour vous, mais moi, je ressens comme un vide après cette Coupe du Monde. Il y a l’excitation qui descend, et qui surtout n’est pas complètement sortie du fait du résultat final.
Je suis frustré, désabusé…
Bon, on va devoir arrêter de parler de sport alors…
Mais qu’y a-t-il dans la vie, finalement, à part le foot ?
L’Iran et la bombe ? La préservation des espèces ? Le réchauffement climatique ? Quel intérêt, au fond, tout ça maintenant que Zizou a filé son coup de boule ?
Ou alors, le sexe ?
Oui, mais la chair est triste, hélas, et j’ai vu tous les matches.
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Blogger quotidiennement, c’est tellement Web 1.0 ! 14 juin 2006
Par Thierry Klein dans : Humeur.Lu 4 826 fois | 1 commentaire
Cela fait plus d’un an que je me bats (pas bien fort, c’est une façon de parler) contre la norme Loïc qui stipule qu’il faut blogger le plus fréquemment possible pour avoir un bon blog (je en sais pas trop ce qu’est un bon blog, d’ailleurs, et ces deux mots sont peut-être contradictoires, mais peu importe).
Les premiers billets qui vont dans mon sens arrivent maintenant sur le marché… Eric Kintz donne 10 raisons, toutes moins intéressantes les unes que les autres, pour lesquelles la règle « Tu bloggeras tous les jours » est mauvaise (J’ai d’ailleurs l’impression que le raisonnement en 10 points est lui aussi en train de devenir une habitude idiote de bloggueur).
A noter qu’il y a plusieurs raisons non pertinentes, voire fausses, dans l’exposé d’Eric Kintz. Par exemple, le fait que « poster souvent ne génère pas plus de trafic » (c’est faux, j’ai testé), ou que « poster souvent met en danger la crédibilité de la bloggosphère » (fermez les yeux 3 secondes, respirez profondément et tentez de saisir le contenu de cette affirmation, simplement pour approcher une fois dans votre vie la notion de vacuité totale).
La première raison valable avancée par Eric Kintz ne vient qu’en numéro 6 : « Blogger fréquemment entraîne une baisse de la qualité du blog« . L’autre bonne raison, « J’aime trop ma famille pour blogger tout le temps« , vient en dernier…
Au-delà de l’apparence de rationalité dont se pare son billet, il faut donc surtout y voir l’expression d’une tendance de fond, une nouvelle mode: blogger tous les jours, ça devient, comme le dit Eric, « tellement Web 1.0 » !
Autre façon de dire ça, le bénéfice narcissique que retire le bloggeur est trop faible pour justifier, dans le temps, un investissement quotidien: la bloggomanie est soluble dans l’effort.
« Quant à moi », conclut Eric, « je ne bloggerai plus que lorsque j’ai des choses à dire ».
Eric, ce serait peut-être encore mieux si tu te contentais de les penser…
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