Vos photos sont des clichés 12 septembre 2017
Par Thierry Klein dans : Non classé.Lu 3 493 fois | ajouter un commentaire
Un programme récent a permis à 2 ingénieurs de Stanford de prédire l’homosexualité ou l’hétérosexualité de personnes à partir de simples photos avec une probabilité de 81%.
L’étude ne permet en rien, comme le prétend l’article du Figaro, d’appuyer la théorie biologique de l’homosexualité car les photos représentaient des adultes et on est, au moins en partie, « responsable de son visage ». Les expressions du visage, à l’âge adulte, ont évidemment aussi une part d’acquis et on ne sait pas – c’est le principe des réseaux de neurones – ce qui a « influencé » l’algorithme. Pour commencer à valider l’hypothèse biologique, il faudrait passer des photos de bébés et attendre une trentaine d’années ! Ou chercher à prédire l’orientation sexuelle en fonction de l’ADN des personnes.
En revanche, l’étude montre qu’il peut y avoir intuition sans discrimination. Les humains à qui on présente les photos reconnaissent aussi homosexuels et hétérosexuels, à hauteur de 61% environ. Eux aussi auraient du mal à expliquer pourquoi puisque notre cerveau étant une machine qui fonctionne comme un réseau de neurones, on ne sait pas pourquoi on pense ce qu’on pense. Mais si on sort du cadre de l’orientation sexuelle, ce que montre l’étude, c’est que vos impressions lors d’un entretien d’embauche, par exemple, sympathie / antipathie, confiance, etc. ne sont peut être pas arbitraires, même si vous êtes incapable de les étayer. Elles peuvent reposer sur des signes tangibles que votre cerveau analyse de façon inconsciente. Elles se révèlent souvent à vous sous forme de sentiments ou d’impressions mais votre « coeur », finalement, est bien intelligent.
Il y a quelques mois, un usager de Facebook a été obligé de faire son « coming-out » parce que ses amis et la famille qui consultaient sa page voyaient apparaître des pubs pour des produits utilisés avant tout par les homosexuels. L’algorithme n’avait pas cherché à connaître son orientation, mais la connaissait quand même par corrélation, à partir de ses habitudes en ligne, des pages qu’il consultait, des produits qu’il achetait, etc.
Encore cet usager était il au courant de son orientation sexuelle. Mais on peut tout à fait imaginer un homosexuel refoulé à qui l’algorithme révélerait son orientation inconsciente. Cela pourrait être un peu embêtant si la personne est mariée – ou prêtre. Les habitudes en ligne, les lapsus qu’on réalise sur le clavier, le rythme de frappe des touches, etc. constituent des données beaucoup plus puissantes et révélatrices que la simple analyse des photos. Et on peut développer des algorithmes bien moins sommaires que celui employé par les chercheurs de Stanford (qui ont simplement analysé le côté féminin ou masculin du visage, quel stéréotype honteux !).
Tout ceci se passera, c’est évident. L’algorithme ne connaît pas le concept de conscient ou d’inconscient, il n’en a pas besoin, il fonctionne.
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Quand le « respect » s’oppose à la laïcité : l’interview de Jean-Michel Blanquer à ONPC. 7 septembre 2017
Par Thierry Klein dans : Politique.Lu 22 870 fois | ajouter un commentaire
Selon moi, Jean-Michel Blanquer a effectué une excellente prestation samedi soir à ONPC. Mais je voudrais revenir sur une de ses déclarations, passée à tort à peu près inaperçue. Il a dit très exactement ceci :
« Les élèves doivent apprendre à lire, écrire, compter et respecter »
Cette formule, évidemment préparée, était destinée à mettre en valeur toute l’importance que Blanquer accorde au « respect ».
Mais, alors qu’on peut sans problème évaluer le niveau de lecture, d’orthographe, de calcul d’un élève, on ne peut jamais vraiment évaluer son niveau de « respect ». On ne peut évaluer que le respect que montre l’élève, où la façon dont il parle du respect, on ne peut pas évaluer si celui-ci respecte réellement, dans son for intérieur, son prochain.
Apprendre et surtout évaluer le « respect » enseigné à l’élève à l’école tient donc du paradoxal. L’élève doit, pour recevoir une bonne note, imaginer ce que le professeur attend de lui et le lui restituer. Autrement dit, il doit agir en parfait hypocrite, ce qui veut dire qu’il ne respecte pas le professeur et sans doute aussi qu’il ne se respecte pas lui-même. Les meilleurs acteurs sont récompensés, pas les élèves les plus sincèrement respectueux. On demande en fait aux élèves d’être Tartuffe et cette demande paradoxale est la conséquence d’un penser politiquement correct.
Ainsi, en voulant sans doute donner des gages aux conservateurs, Jean-Michel Blanquer fait la même erreur que les bien-pensants gauchistes ou pédagogistes, qui, depuis trente ans ont cherché à inculquer aux élèves des valeurs, des façons d’être, plutôt que de transmettre du savoir. Ce que produit ce genre d’attitude convenue, c’est du politiquement correct dans le meilleur des cas, de l’hypocrisie ou de la névrose dans les cas les plus avancés.
Je rappelle les mots de Ferdinand Buisson sur le sujet, parce qu’on ne saurait mieux dire :
« Sous tous les régimes, la tentation des gouvernants est la même : interdire l’enseignement des “mauvaises doctrines” [ou forcer l’enseignement des « bonnes », en l’occurrence ici du fameux « respect »].
Si nous en revenons à cette notion surannée de l’Etat faisant la police des intelligences, nous verrons, suivant le vent qui soufflera, refuser le diplôme aujourd’hui à un professeur, homme ou femme, qu’on jugera trop catholique, demain à un autre qui semblera trop socialiste, à tel comme réactionnaire, à tel autre comme révolutionnaire.
Et au bout du compte, tout ce qu’on aura réussi à tuer, sans retour, ce sera l’enseignement lui-même.
Il n’y a plus ni enseignement ni éducation là où il n’y a plus la liberté de la pensée et la sécurité de la parole.
Qui n’est pas un homme libre n’est pas un éducateur. Credo d’église ou credo d’Etat, c’est également la mort de l’esprit. »
De quoi le terme « respect » employé par Jean-Marie Blanquer est-il le nom ?
Le terme « respect », de nos jours, est employé à chaque fois qu’il faut masquer la contradiction entre principe et réalité. François Hollande a expulsé Leonarda en passant son temps à faire savoir qu’il la respectait. Les salariés de Florange « devaient » être licenciés mais ils auront été (ça leur fait une belle jambe !) « écoutés et respectés » par le Ministre. On reproche à Emmanuel Macron de traiter des ouvrières d’illettrées au nom du « respect » qui leur est dû, ce qui évite d’essayer de comprendre comment cette situation peut se produire dans une société où l’école est obligatoire. Dans la « négociation » qui vient d’avoir lieu sur la loi travail, on a jugé que les syndicats étaient « respectés » parce qu’ils avaient été invités à des réunions où on les a simplement écoutés sans tenir en rien compte de leur avis. (Et il semble que certains s’en contentent !). Le terme « respect », en l’espèce, signifie qu’il n’y a eu absolument aucune négociation.
C’est bien simple, mes amis me reconnaissent, de façon constante, un naturel affable et doux. Mais si je m’écoutais, et si ça ne me rappelait pas de trop mauvais souvenirs, à chaque fois que j’entends le mot « respect », je sortirais mon revolver.
Respect, libéralisme et laïcité
Quand Yann Moix a demandé à Jean-Michel Blanquer quelles mesures il allait prendre pour éviter les dérives islamistes dans les lycées de banlieue (suite au livre d’un principal de collège marseillais), le Ministre a benoîtement répondu que toutes les mesures étaient déjà prises, que l’état d’esprit avait changé et qu’il suffirait maintenant de traiter les dérives éventuelles via les voies hiérarchiques habituelles, au niveau local.
Peut-être Jean-Marie Blanquer veut-il montrer ainsi l’importance qu’il accorde à l’autonomie de l’établissement, qui semble être un de ses dadas. Mais ici, laisser les choses se faire « librement » ou plutôt « libéralement » est nocif. Le rapport de force pour lutter contre ces dérives est profondément défavorable au professeur et à l’établissement. L’enseignant qui a des problèmes pour enseigner la Shoah ou Darwin hésitera comme avant à signaler ceci à son administration qui, si elle n’est pas toujours complice, regarde souvent lâchement ailleurs. Elle a permis que les élèves juifs disparaissent des collèges publics dans des départements entiers et ce n’est pas le nouvel état d’esprit de Jean-Michel Blanquer qui va permettre leur « réintroduction ».
On voit bien que pour lutter contre l’islamisme dans les écoles, il faut l’intervention marquée, rapide du pouvoir central, seul capable d’inverser ce rapport de force. Au minimum, il faut créer un canal permettant de signaler les situations, par exemple un numéro vert national, peut-être même un bureau placé directement sous la responsabilité du Ministre qui permette d’assurer que l’administration locale n’évite de détourner le regard afin de soutenir, de façon forte, le professeur.
Mais comme rien de tout ceci ne va se passer, les attaques à la laïcité vont continuer à prospérer. L’administration locale invoquera justement, comme elle le fait d’habitude, le « respect » d’autrui, de sa religion, de sa culture ou d’autres notions obscurantistes complètement fumeuses (au pays de Pasteur, aujourd’hui, on ne dissèque plus les grenouilles à l’école au nom du « respect du vivant »).
Ce que masque l’emploi du mot « respect » chez Blanquer, c’est la fin de la laïcité et le triomphe d’un certain obscurantisme.
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L’école des robots : une offre robotique complète, pour apprendre à programmer à l’école… et à la maison ! 5 septembre 2017
Par Thierry Klein dans : Speechi.Lu 3 fois | ajouter un commentaire
Ceux qui nous connaissent le savent, cela fait plus de 5 ans que nous militons en faveur de l’introduction de la programmation informatique à l’école. Nous l’avons fait par conviction, nous pensons, nous savons, que la programmation informatique est devenue une matière fondamentale, indispensable à la compréhension du monde et à l’émancipation des enfants, au même titre que les mathématiques ou le français.
Nous n’avions jusqu’à présent pas d’offre commerciale et ne savions pas si nous pourrions jamais en proposer une. Pour apporter quelque chose, il faut faire mieux, sous certains aspects, que la concurrence existante et il se trouve que la concurrence est excellente. J’ai un immense respect, par exemple, pour ce que réalise Lego en matière d’initiation à la robotique.
Aujourd’hui, nous pensons avoir développé une offre qui apporte des éléments nouveaux pour apprendre à programmer par le développement de petits robots par-rapport à toutes les solutions connues. Cette offre repose sur les trois caractéristiques suivantes :
Un environnement de développement simple et ouvert pour les enfants, basé sur Scratch
L’environnement que nous proposons ne repose pas sur un langage fermé ou des outils propriétaires. Les élèves développent sous Scratch, langage qui s’est imposé au primaire et au collège pour sa simplicité. Les plus grands peuvent programmer les robots en python (langage en train de s’imposer en France au lycée). Ou même en C.
Des briques de construction d’une très grande simplicité
Un des problèmes de l’apprentissage par les robots est que l’exercice se transforme facilement en jeu de construction. D’un côté Lego, avec des briques simples mais peu pratiques, qui ne s’assemblent que par le dessus. De l’autre côté des kits plus complets, certes, mais qui contiennent parfois des centaines de pièces et de connecteurs…
Les briques de base que nous proposons peuvent être connectées en haut, en bas, sur les côtés, en diagonale. Dans nos tests (que nous publierons), nous utilisons, pour des robots de complexité comparable, deux fois moins de briques que Lego. Et les robots sont construits deux à trois fois plus vite.
Le temps gagné permet à l’élève, et à l’enseignant, de se consacrer au développement de ce qui compte le plus : l’algorithme.
Arduino : une plate-forme électronique simple, ouverte et riche
A la différence de la plupart des offres concurrentes, l’intelligence (la partie électronique) de nos robots est elle aussi ouverte (Open Source). Leur carte de base est, pour les geeks, une carte Arduino, qui pourra recevoir un immense nombre de capteurs, moteurs, périphériques Bluetooth, etc…
Nos boîtes viennent avec une offre extrêmement riche de capteurs (un robot doit « comprendre » son environnement) et d’effecteurs (un robot doit « agir » sur son environnement), tous compatibles avec la carte Arduino et intégrés dans nos environnements de programmation Scratch et Python.
( « Extrêmement riche » : façon prudente et polie de dire que c’est tout simplement l’offre la plus riche du marché, à ma connaissance.)
Un cursus complet adapté au programme du collège
Le codage est rentré au programme en septembre 2016. Les bons livres utilisables par les enseignants sont rares, façon polie et prudente de dire que je n’en connais pas.
Nous avons développé un cursus complet de 16 modules, muni de son manuel professeur, qui apporte aux enfants à la fois des notions théoriques (l’algorithmie est une branche des mathématiques) et pratiques, permettant de réaliser des robots de plus en plus avancés (l’informatique n’a de sens que pratique, sous forme de programme réalisant une fonction).
Ce cursus, que nous lançons aujourd’hui, a vocation à aider les enseignants dans l’enseignement de cette nouvelle matière.
Une offre enseignement, une offre grand public
Ce que nous lançons aujourd’hui, c’est une offre enseignement, qui grosso modo, peut convenir à l’enseignement du codage du CM2 à la classe de terminale, mais aussi une offre grand public qui peut convenir à tous les papas souhaitant passer du temps intelligemment avec leurs enfants. Pour me faire pardonner ce biais sexiste, vous serez heureux d’apprendre que deux mamans de Speechi l’ont testé avec le leur et que ça marche très bien aussi dans ce sens (le tyrannosaure bouge de façon un peu bizarre cependant !).
Combien ça coûte ?
Une dernière chose : contrairement à ce que vous pouvez penser, tout ceci n’est pas cher. La boîte Education nationale coûte 235 € HT et convient pour tous les niveaux au collège. Le robot tyrannosaure (boîte grand public) vaut 110 € HT. C’est aussi un des avantages de notre technologie, j’en parle en dernier parce que le premier, le grand avantage de ces kits, c’est leur simplicité, leur souplesse et leur intérêt pédagogique, qu’ils soient manipulés chez soi ou à l’école.
Ces robots sont avant tout un merveilleux outil pour développer la pensée des enfants. Ils leur permettent de faire des essais, de vérifier des hypothèses, de faire des erreurs et de les corriger – tout ceci, il n’est pas facile de l’apprendre à l’école.
Et le pire, c’est que c’est (très) amusant !
En savoir plus : www.ecolerobots.com
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