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Comment modérer Twitter sans attaquer la liberté d’expression 28 février 2025

Par Thierry Klein dans : Politique.
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Parmi les problèmes que posent Twitter, il y a çe tweet antisémite, mensonger, immonde, tombant manifestement sous le coup de la loi française.

Ce tweet n’est pas automatiquement modéré / suspendu par Twitter (qui pourtant dispose d’une IA performante) donc pour agir, il faut aller en justice. Or il y a des milliers de tweets de ce genre. Certains sont même générés par des bots, automatiquement. Autrement dit, sans la participation amont et automatique de Twitter, qui devrait spontanément fournir les infos disponibles sur les auteurs à la justice, il est impossible de résoudre le problème.

Accumulés, rassemblés, de tels tweets contribuent à créer un antisémitisme d’atmosphère. Les antisémites se rassemblent sur Twitter et forment une tendance, une sorte de bulle qui leur donne l’impression d’être plus nombreux et plus puissants qu’ils ne sont. Ils se tirent la bourre entre eux allant chaque jour un peu plus loin. Et un excité passera à l’acte…

Twitter héberge ces tweets et est responsable de leur diffusion. Ma proposition serait que les réseaux sociaux soient obligés de communiquer, instantanément, automatiquement et proactivement, tous les tweets manifestement illicites. La notion d’illicéité manifeste est très bien définie juridiquement et ne s’oppose pas à la liberté d’expression – les hébergeurs de site Internet sont déjà soumis à de telles contraintes. Elle couvre par exemple le racisme manifeste, la pédophilie, certaines formes de contrefaçon, etc.

Ce serait alors à l’auteur du tweet d’agir, auprès de l’hébergeur puis en justice, s’il trouve que son tweet a été censuré à tort. Ce qui compte tenu de la qualité des IA actuelles arriverait dans moins d’un cas sur 10 000. On résoudrait un problème sans encombrer les tribunaux.

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De la liberté d’expression et du wokisme, en France et aux USA 18 février 2025

Par Thierry Klein dans : Politique,Wokisme.
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Pour comprendre la différence entre la vision française et la vision américaine de la liberté d’expression, le mieux est de se ramener au discours fantastique de Marc-Antoine dans Shakespeare, immédiatement après l’assassinat de César. Antoine est un démagogue qui appelle la foule à la violence mais il ne le fait jamais explicitement. Toute la technique de son discours consiste à louer César – en prétendant ne pas le louer car il est lui est interdit de le faire par la clique en place, à rappeler le jugement négatif sur César de Brutus sans jamais attaquer directement Brutus puisque, dit-il sans fin, “Brutus est un homme honorable”, enfin à utiliser l’émotion que crée son discours sur la foule pour prendre le pouvoir. Extraits:

Le noble Brutus vous a dit que César était ambitieux: s’il l’était, ce fut une faute grave, et César en a été gravement puni.—Ici par la permission de Brutus et des autres car Brutus est un homme honorable.

Il était mon ami, il fut fidèle et juste envers moi; mais Brutus dit qu’il était ambitieux, et Brutus est un homme honorable.

Lorsque les pauvres ont gémi, César a pleuré: l’ambition devrait être formée d’une matière plus dure.—Cependant Brutus dit qu’il était ambitieux, et Brutus est un homme honorable.

O citoyens, si j’avais envie d’exciter vos coeurs et vos esprits à la révolte et à la fureur, je pourrais faire tort à Brutus, faire tort à Cassius, qui, vous le savez tous, sont des hommes honorables.

Je ne veux pas leur faire tort: j’aime mieux faire tort au mort, à moi-même, et à vous aussi, que de faire tort à des hommes si honorables.—Mais voici un parchemin scellé du sceau de César; je l’ai trouvé dans son cabinet. »

(Pour ceux qui comprennent l’anglais parlé, la magnifique interprétation de Marlon Brando dans le Jules César de Mankiewicz, un film extraordinaire que je conseille à tous)

Aux Etats-Unis, le discours d’Antoine ne pourrait être condamné car son incitation à la violence reste implicite et indirecte. Lorsque Donald Trump a incité ses partisans à “aller au Capitole” et “à se battre comme des diables” (formulation pourtant nettement moins ambigüe que celle de Marc-Antoine !), aucun tribunal ne l’a condamné car son discours était effectivement suffisamment ambigu pour faire jouer la protection du 1er Amendement de la constitution américaine, garantissant la liberté d’expression.

Les américains n’ont jamais connu la dictature, même s’ils en ont été parfois assez proches et ont un comportement d’autant plus optimiste vis-à-vis de la liberté d’expression que les pères fondateurs fuyaient la censure: sur le plan juridique, la liberté d’expression est restée presque totale, protégée par leur Constitution. Cela a posé de tels problèmes que la société a tenté d’imposer une censure de fait pour limiter l’expression d’un racisme omniprésent que la loi ne contraignait pas assez. Cette censure a été portée par le wokisme dont il ne faut pas oublier qu’il fut aussi, sous cet aspect, une solution absurde et excessive pour tenter de résoudre un problème bien réel. 

En France, Vichy et son antisémitisme nous ont probablement rendus excessivement méfiants vis-à-vis des conséquences possibles d’une liberté d’expression sans limite. Ce qui fait que le wokisme, sous la forme d’une sorte de principe de précaution judiciaire, a infusé de façon excessive dans la loi même jusqu’en 2021, celle-ci n’étant pas gravée constitutionnellement dans le marbre comme aux Etats-Unis, et ce alors même que le niveau de racisme en France est infiniment moindre qu’aux Etats-Unis et que nous ne vivons pas de risque sérieux de dictature. (D’autres pressions contre la liberté d’expression sont apparues depuis la guerre, en provenance surtout de l’Islam, mais pour l’instant, notre système juridique y résiste).

On peut dire, en synthèse, que si aux USA, la société a été troublée par l’absence de loi ad hoc, en France, la loi a dépassé les besoins de la société.

Cette constatation s’applique aussi à l’Allemagne qui a connu bien pire que Marc-Antoine en l’espèce. La 2ème guerre mondiale explique pourquoi ce que je vais décrire ci-dessous sur les lois françaises et leur philosophie tient presque tel quel pour l’Allemagne pour presque toute la communauté européenne.

Chez nous, le discours de Marc-Antoine serait donc presque certainement condamné, même si Antoine ne demande jamais à la foule d’attaquer Brutus. La notion de provocation implicite à la violence tient juridiquement et le juge établirait certainement un lien de causalité entre le discours d’Antoine et l’émeute qui s’ensuit. Ainsi, l’ironie, le double sens du discours d’Antoine n’empêcheraient pas sa condamnation et j’ai tendance à penser que, sur ce point, notre droit est bien supérieur au droit américain car il paraît naturel de condamner l’intention, lorsqu’elle est évidente, plutôt que la forme. En revanche, le cas de l’incitation à la haine raciale est plus difficile à trancher.

Il est en effet possible en France de condamner une vérité si elle est jugée stigmatisante pour un groupe de personnes. Ainsi, Le Pen a été condamné en 1997 pour avoir dit que « les Français de souche ont moins tendance à commettre des délits que les immigrés » (ce qui est vrai). Zemmour a été condamné pour le même motif. Même si le fait est vrai, la loi française va chercher l’intention de l’auteur et l’interprète de façon très large. Dans le cas de Le Pen, le fait que les immigrés soient présentés de façon “systématiquement négative” est suffisant, aux yeux du juge, pour condamner Le Pen. Le juge peut aussi estimer que la citation “crée un climat de rejet ou d’hostilité” ou même “crée un lien de causalité simpliste” entre l’origine et la criminalité (3 critères donc, et il suffit d’en satisfaire un seul pour tomber sous le coup de la loi). De fait, une telle affirmation, même présentée de façon neutre sera presque certainement condamnée. Pour passer à travers les gouttes, l’auteur devra ajouter de multiples circonvolutions, le plus souvent de pure forme, uniquement destinées au juge. Voici ce qu’on entend donc typiquement sur les plateaux télés.

“« Selon l’INSEE, certaines catégories de la population ont des taux de condamnation plus élevés, mais ces chiffres doivent être analysés en tenant compte de nombreux facteurs socio-économiques. »

Avouez que le discours perd tout sens ! Et on comprend parfaitement pourquoi la droite parle de censure ou de fin de la liberté d’expression. En démocratie, il est extrêmement choquant d’être condamné pour avoir dit une vérité, même si elle pique un peu. Il y aurait un moyen très simple de libérer la parole tout en se protégeant largement contre les tentatives réelles d’incitation à la haine raciale, qui serait d’introduire une exception de vérité dans la loi et de retourner alors la charge de la preuve. Si l’on dit effectivement la vérité, le juge ne pourrait condamner l’accusé sur la base de l’un des trois critères énoncé ci-dessus et ce serait alors à l’accusation de faire la preuve de la malveillance de l’accusé. De fait, sauf appel explicite à la haine ou technique rhétorique “à la Marc-Antoine” destinée à transformer implicitement une vérité en appel à la haine, on ne pourrait plus être condamné pour avoir dit une simple vérité. Et j’ai tendance à penser qu’un tel système serait bien meilleur que le Premier amendement américain, figé depuis des siècles, qui n’accomplit plus son office et ne protège plus la société.

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Sur l’IA, la direction politique européenne n’est pas à la hauteur 12 février 2025

Par Thierry Klein dans : Politique.
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Quel contraste entre la déclaration oxymoresque signée hier par les pays européens pour une IA « inclusive, éthique, sûre et ouverte » et le discours du vice-président américain JD Vance, à ce jour le meilleur discours prononcé par un politique sur le sujet. JD Vance a fait preuve d’une compréhension en profondeur de ce qu’est l’intelligence artificielle là où Macron, dans son interview télévisée sur France 2, n’a exhibé qu’un vernis et a accumulé les pontifs.

Que signifie d’abord une IA « inclusive » ? Cela signifie en réalité une IA biaisée, de façon à ce que les minorités y soient sur-représentées par-rapport à leur présence réelle. Ainsi, comme le souligne Vance, qui s’est opposé à la déclaration européenne (« The Trump administration will ensure that AI systems are free from ideological bias« ), les IA entrainées dans un sens « woke » font apparaître des George Washington noirs dans leurs résultats. Une IA inclusive, c’est un IA peu performante, qui nous ment et produit des résultats faux. Or nous devons développer des IA performantes, qui recherchent la vérité. La déclaration européenne (approuvée d’ailleurs par la Chine qui n’en aura cure) nous fait prendre du retard dès l’objectif, comme si, au moment du développement du rail, nous avions développé les gares à la campagne.

Qu’est-ce qu’une IA éthique ? C’est une IA à qui on impose de respecter des contraintes déraisonnables au niveau de la propriété des données personnelles et de son entrainement. JD Vance parle d’étranglement et signale à juste titre que le « Digital Act » européen engendre des coûts de développement complètement dingues pour les petites entreprises, au détriment de l’innovation et a pour conséquences que petites et grandes entreprises boycotteront souvent l’Europe, non seulement comme cible mais comme lieu d’implantation de leur centre de R&D. Là aussi, retard pour les sociétés européennes.

Qu’est-ce qu’une IA « sûre » ? Pour Vance, les seules initiatives de régulation devraient concerner la lutte contre le crime (exemple, la pédophilie) et la lutte contre les dictatures (il vise évidemment la Chine) de façon à les empêcher de copier les développements faits aux Etats-Unis. La vision optimiste « a priori » des américains peut sembler naïve aux européens mais, sur un plan géostratégique, Vance poursuit finalement la guerre du Péloponnèse, démocratie athénienne contre dictature spartiate. « Focus on opportunity, not on safety » : il appelle les pays européens à plus de confiance et à « éviter toute mesure conservatoire de régulation » (ce que nous serons évidemment incapables de faire). Progresser d’abord, réguler si nécessaire ensuite pour ne pas casser l’innovation – c’est contraire à la philosophie même du Digital Act européen.

Un conflit politique est à venir sur la propriété des données. « Nous avons un problème avec le fait que des gouvernements étrangers semblent vouloir limiter le rayon d’action des entreprises américaines ayant une empreinte internationale« . Rappelons que l’administration américaine se réserve un droit de regard sur toutes les données détenues par des entreprises US, où qu’elles soient – ce qui fait que les données françaises chez Amazon sont consultables aux US. Des voix européennes souveraines se sont élevées contre ce contrôle et demandent, à juste titre, une réciprocité. Compte tenu de la guerre commerciale à venir, de la mollesse européenne et de notre incompréhension du sujet, nous ne l’obtiendrons jamais.

Vance compare la révolution IA à celle de la machine à vapeur, ce qui est la meilleure analogie qu’on puisse trouver car l’IA est effectivement à l’intelligence humaine ce que la machine à vapeur a été aux forces humaine et animale. Son seul point commun avec Macron est qu’il reste optimiste sur les conséquences de l’IA sur le monde du travail. « L’IA va aider les gens dans leur travail et créera des opportunités, nous nous refusons à y voir une simple force disruptive qui ne ferait qu’automatiser le monde du travail » (Vance), « L’IA aidera l’humain sans s’y substituer » (Macron). Je suis donc en désaccord complet avec la seule chose qui les rassemble: l’IA va être au travail intellectuel ce que la machine a été aux manufactures. Un grand nombre de professions vont disparaître – ça a commencé pour les journalistes mais à relativement court terme, avocats, médecins ainsi qu’un grand nombre de managers et d’industrie seront touchés. Même le monde artistique n’y échappera d’ailleurs pas.

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L’état de droit mène à tout, à condition d’en sortir. 1 octobre 2024

Par Thierry Klein dans : 7 Octobre,Politique.
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L’état de droit n’est pas sacré. Tout système judiciaire doit avoir pour objectif de maximiser la quantité de justice qu’il produit et l’état de droit n’est qu’un outil au service de cet objectif. Seule la Justice est sacrée, au sens où elle est inscrite dans la conscience universelle et c’est relativement à elle qu’on mesure le degré de progrès ou de civilisation. Dire que l’état de droit est sacré, c’est confondre la fin et le moyen, c’est-à-dire se rendre coupable d’idolâtrie.

Le principe fondamental de l’état de droit est le refus de l’arbitraire et l’égalité de tous devant la loi.  Les principes étant fixés et connus à l’avance, il assure que je suis jugé de façon équitable, exactement comme mon prochain. Le juge n’est chargé que de l’interprétation de ces principes – dont la réunion forme le corpus de la loi. Cette condition de relativité absolue (“juge ton prochain comme toi-même”) est bien indispensable à l’atteinte de la justice. 

Le juge ne faisant qu’interpréter les textes de loi, la plupart des décisions de justice sont de nature procédurale et c’est pourquoi, si le système judiciaire fonctionne, on peut considérer que les décisions ne peuvent pas être critiquées. En France, jeter le discrédit sur une décision de justice est depuis longtemps une infraction, infraction commise de plus en plus fréquemment et de moins en moins poursuivie, signe très sûr de la déliquescence de notre système judiciaire.

L’état de droit en lui-même n’est évidemment pas suffisant et la qualité de la justice dépend évidemment du contenu de la loi elle-même, en particulier de son accord à la conscience universelle. Simone Weil écrivait que c’est relativement à cet accord qu’on mesure le progrès.

Il appartient donc aux textes de loi de résoudre les problèmes éthiques qui se posent à l’homme et la société. Chez les anciens hébreux ou dans l’Islam, la loi procède de Dieu et les religieux détiennent largement le pouvoir judiciaire. En France, la loi procède du peuple français, les principes éthiques étant largement influencés par notre histoire judéo-chrétienne, à commencer évidemment par la notion même d’état de droit, dont découle la condition de relativité que j’ai évoquée ci-dessus.

Ainsi doivent normalement être soumis au Peuple Français les choix fondamentaux sur son avenir, les choix éthiques qui représentent les “cas limites” du droit, ceux que les textes existants ne pouvaient envisager. Dans la mesure où depuis une quarantaine d’années, les français ont été de moins en moins consultés sur ces cas, on peut dire que notre système est sorti de l’état de droit ou plutôt qu’il y a eu abus de l’état de droit. Ainsi en est-il de l’abolition de la peine de mort, de l’adhésion au Traité Constitutionnel Européen, de la non consultation des français sur la politique migratoire, de l’extension du rôle du Conseil Constitutionnel ou de diverses décisions prises par le Conseil d’Etat… Ces choix auraient dû remonter aux citoyens, à qui on doit demander de se positionner non pas en partisans mais en philosophes, ou au Parlement.  Ainsi quoi qu’on pense des décisions elles-mêmes, elles ont été prises contre l’état de droit. A l’inverse, la loi Veil sur l’avortement, votée par l’Assemblée suite à un débat exemplaire, est totalement conforme à l’esprit de l’état de droit.

La procédure de destitution du Président Macron constitue une perversion de l’état de droit. Car la loi précise que “Le Président de la République ne peut être destitué qu’en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat.”. Qui peut en conscience nier la pleine capacité d’Emmanuel Macron ? Ainsi, les députés qui ont validé la procédure, se conduisant en partisans et non pas en philosophes, créent la confusion entre conscience universelle et esprit partisan. Seule la première relève de l’état de droit.

L’appel entendu si fréquemment depuis le 7 Octobre au “droit international” est aussi une perversion de l’état de droit, dans la mesure où celui-ci procède de l’ONU, lui-même majoritairement soumis à des états partisans, non démocratiques, qui prendront des décisions ne reposant pas sur la conscience universelle mais sur les intérêts de pays obscurantistes, voire terroristes et de dictatures. Ces sophismes doivent être dénoncés avec force car la confiance des français en l’état de droit, confondu avec la Justice, est telle qu’elle désarme souvent toute critique.

Il n’y a pas non plus d’état de droit sans force exécutive. Un des objectifs clés du système judiciaire est la protection des citoyens et si la décision du juge n’est pas mise en œuvre, l’état tombe dans l’anarchie, la violence interminable.

Ainsi non seulement Bruno Rétailleau a philosophiquement raison lorsqu’il déclare que “l’Etat de droit n’est pas sacré” mais il est en quelque sorte en deçà de la réalité: en France, l’état de droit n’est plus, par défaut de la force exécutive. Les peines de prison sont édulcorées, raccourcies. Les zones de non droit pullulent. Les OQTF ne sont pas exécutées. Le meurtre de Philippine a précisément mis en évidence de façon criante la faillite de l’état de droit et ceux qui s’indignent des déclarations du Ministre de l’Intérieur crient d’autant plus au feu que, selon les termes du grand psychanalyste Winnicott, la catastrophe est déjà accomplie. L’effondrement tant redouté de l’état de droit a déjà eu lieu. S’ils crient si fort au scandale, c’est justement pour ne pas voir la vérité en face – très souvent, ils ont été les acteurs de l’effondrement.

Dans l’Orestie, Eschyle décrit de façon très profonde la création du premier système judiciaire. Clytemnestre assassine Agamemnon, Oreste tue Clytemnestre et l’aréopage – le jury – est créé précisément par Athéna, la sagesse, pour mettre fin au cycle de violence interminable. Un processus formel de vote est mis en place mais au dernier moment Athéna en modifie les règles en décrétant qu’en cas d’égalité de voix, Oreste sera acquitté. En sortant de l’état de droit, elle rend possible l’état de droit. Une part d’humain, une part de divin – appelons le “conscience universelle”, la conscience qu’il n’y a pas de justice purement procédurale, Eschyle en savait déjà plus que nous sur l’état de droit.

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Le temps de l’innocence, d’Edith Wharton, au programme des classes prépas 13 août 2024

Par Thierry Klein dans : Critiques,René Girard.
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Il doit y avoir quelque part, haut placé au Ministère de l’Education Nationale, un réactionnaire masqué qui définit les merveilleux programmes de français des prépas scientifiques. Ces programmes, depuis deux ans, constituent une déconstruction en règle de toute la rhétorique de gauche qui soumet toute la société à l’hypertrophie des droits de l’individu. En 2023, c’est le “droit à la paresse” qui était déconstruit, le programme allant pile poil à l’auteur clé pour moi sur ce sujet, Simone Weil (“Conditions pour un travail non servile”). La deuxième partie du programme, “Faire croire”, permettait de relativiser largement la notion, aujourd’hui mise à toutes les sauces, louée, hypertrophiée par l’extrême-gauche, de “désobéissance civique” (avec Hannah Arendt, là encore remarquablement pertinente et permettant de réfléchir sur les moments où ce concept peut être ou ne pas être justifié) ainsi que de comprendre les ressorts du discours totalitaire menant à la violence, typique de partis tels que le parti nazi à l’époque, typique de partis tels que LFI aujourd’hui.

En 2024, ce haut fonctionnaire masqué, que j’aimerais vraiment rencontrer, qui sauve l’honneur de l’Education Nationale, a récidivé et enfoncé le clou: le thème du programme 2024 est encore plus explicite, actuel et politique: “La communauté et l’individu”. Pourtant, ce thème n’est abordé qu’à travers des œuvres classiques très anciennes. Eschyle, naturellement;  Spinoza, bien sûr; il manque “Le contrat social” (mais on aura sans doute pu en parler en classe autour de Hannah Arendt) mais surtout, surtout !, il y a cet extraordinaire roman d’Edith Wharton, “The age of innocence”, écrit il y a une centaine d’années qui aborde, entre autres, le thème de la contrainte sociale, du politiquement correct, des “codes” que fait peser la société New-yorkaise sur ses membres. Ces phénomènes, les élèves n’en ont le plus souvent aujourd’hui qu’une vision unilatérale, militante, statistique,  sociologique – via Bourdieu et ses descendants “déconstructeurs”. 

Le point de vue d’Edith Wharton en tant que romancier est radicalement différent. Là où la sociologie utilise une sorte de télescope tentant d’analyser de loin la tendance statistique d’un groupe, elle se sert elle d’un microscope pointé sur chaque individu pour étudier les répercussions psychologiques du groupe sur l’individu. On oppose souvent la soit-disant “objectivité” de la sociologie à la “subjectivité” du romancier pourtant cela n’a aucun sens tant l’approche de Wharton est clinique et pour tout dire, anthropologique puisque ce roman est en fait la description d’une exclusion rituelle, tribale, d’un des membres du groupe. Le langage anthropologique, sacrificiel, religieux est partout présent chez Edith Wharton. 

Quelques exemples:

“L’individu est presque toujours sacrifié à ce qu’on pense être l’intérêt collectif.”

“Il fut frappé par la dévotion religieuse des femmes américaines, même les plus candides, envers la signification sociale de la robe.”

“Certaines choses devaient absolument être accomplies et parmi elles […], selon le vieux code New-yorkais, il y avait les manifestations de soutien tribales à une parente en voie d’exclusion de la tribu. […] C’était la façon qu’avait New-York de prendre la vie “sans effusion de sang. ”

On pense à Proust (qu’Edith Wharton avait évidemment lu – “Le temps de l’innocence”  est aussi une histoire de “salons”), à l’exclusion de Swann ou de Saniette du salon des Verdurins et à l’analyse qu’en fait René Girard, arrivé à la compréhension anthropologique du meurtre collectif via le roman :

“ Les rites d’union sont des rites de séparation camouflés. On n’observe plus ces rites pour communier avec ceux qui les observent pareillement, mais pour se distinguer de ceux qui ne les observent pas.”

Ainsi le point de vue du romancier, aujourd’hui décrié, est à la fois antérieur à celui du sociologue et plus profond car la communauté sociologique fonctionne aujourd’hui, à son corps défendant, comme la haute société new-yorkaise et le salon des Verdurins, qu’elle croit dénoncer. Elle a ses propres rites d’inclusion et d’exclusion. Le romancier, ou son lecteur, comprennent tout ceci alors que le sociologue et son étudiant passent à côté. Et on touche du doigt tout le paradoxe moderne: un grand nombre de disciplines qui croient aller au-delà de la critique classique, la dépasser, sont en fait l’objet même de la critique classique, et ce depuis plus de 2 000 ans.

Il y a aussi ces observations stupéfiantes de lucidité d’Edith Wharton sur la façon dont la société new-yorkaise gère ses transitions.

“C’était ainsi que New York gérait ses transitions: conspirant pour les ignorer jusqu’à ce qu’elles soient accomplies, et alors, en toute bonne foi, imaginer qu’elles avaient été accomplies depuis longtemps. Il y avait toujours un traître dans la citadelle et après qu’il eut donné les clés, quel avantage y avait-il à la déclarer imprenable ?”

Sur ce plan, la société progressiste actuelle est infiniment proche de la haute société new-yorkaise de l’époque. Ce n’est nullement un hasard puisqu’elle en est en quelque sorte la mère (via l’influence des philosophes déconstructeurs français) et la  fille (via l’export culturel des courants sociaux américains vers l’Europe dans les 30 dernières années).  Je vous donne quelques exemples d’applications récents tirés de l’actualité (et vous laisse en découvrir d’autres).

  • La négation pendant 50 ans des effets de l’immigration, suivie de l’observation qu’il est trop tard pour revenir en arrière.  « Notre peuple s’est créolisé, le peuple français a commencé une sorte de créolisation. il ne faut pas en avoir peur, c’est bien. On avance, on vit » (Jean-Luc Mélenchon, après avoir pendant des dizaines d’années minimisé ou nié l’importance du phénomène migratoire). Ce point de vue présente de multiples variantes, fausses mais énoncées probablement en toute bonne foi, comme “Historiquement, la France a toujours été une terre de migration”).
  • La non reconnaissance de la baisse de niveau en orthographe depuis 40 ans, suivie de l’observation, une fois cette baisse de niveau accomplie, qu’améliorer le niveau ne sert à rien. “Ca ne sert à rien d’étudier l’orthographe qui n’est qu’un code social arbitraire et inutile” a récemment déclaré Franck Ramus, membre du conseil scientifique de l’éducation Nationale. De multiples universitaires, les mêmes qui annonçaient fièrement que la baisse de niveau était une illusion, qu’en fait le niveau moyen montait, ont adopté ce point de vue. 
  • Le refus par les Verts de relancer les programmes nucléaires au prétexte qu’il serait trop tard, puisque les réacteurs planifiés aujourd’hui ne seraient pas prêts avant 2040. Depuis 50 ans, les Verts, avec succès, ont retardé ou tué les programmes nucléaires les prétendant superflus, en prônant le développement d’énergies alternatives qui sont très loin de pouvoir subvenir aux besoins énergétiques. Plutôt que d’utiliser la technologie la plus intéressante pour lutter contre le réchauffement, ils décrètent que la transition est accomplie.

Pour René Girard1, tout grand roman est l’histoire de la conversion chrétienne du héros et c’est à mon sens bien ainsi qu’il faut interpréter le choix ultime de Newland. Au dernier moment, alors qu’il peut renouer le contact avec Mme Olenska, 25 ans après son renoncement contraint, il renonce à la voir et son sacrifice subi se transforme en sacrifice consenti ce qui est l’archétype de la position chrétienne. On pense au Drogo à la fin du désert des Tartares ou, évidemment, au temps retrouvé chez Proust. 

Les événements qui vont déterminer le destin de Newland Archer s’enchaînent pour lui de façon inexorable, mécanique et selon une logique qui lui est extérieure. Il les vit comme le héros d’une tragédie grecque – retour à l’Eschyle du programme, le destin étant symbolisé dans le roman par la combustion et l’effondrement des bûches dans la cheminée, qui accompagnent chaque coup de théâtre tragique. Mais nous ne sommes plus en Grèce et ce ne sont plus les Dieux qui sont responsables du destin de Newland. En toute rigueur, ce n’est peut être même pas non plus “la société” (qui est aux sociologues ce que les Dieux étaient parfois à la Grèce, un bouc émissaire de circonstance). Le responsable direct est Archer Newland lui-même. Le roman le désigne mais ne le nomme pas, ne l’accuse pas et c’est peut-être (voir ci-dessous) ce qui crée l’atmosphère de poésie.

Archer Newland, s’il analyse parfaitement a posteriori les ressorts sociaux de son environnement traverse son histoire en aveugle car sa compréhension de ce qui se joue est toujours tardive, comme celle d’Oedipe chez Sophocle. C’est Mme Olenska qui le pousse à exprimer ses sentiments, en lui montrant qu’elle a compris la signification des roses jaunes qu’il lui envoie. Il comprend trop tard qu’il en est amoureux et c’est lui qui lui conseille de ne pas divorcer – il croit ainsi lui éviter un scandale alors que ce divorce la rendrait libre de l’épouser. Il comprend trop tard aussi qu’il est le jouet de la société new-yorkaise et que sa femme est moins candide qu’elle n’en a l’air. C’est elle qui convainc Mme Olenska de ne pas s’engager dans une relation en lui annonçant qu’elle est enceinte. 15 jours plus tard, elle convainc Archer en lui annonçant à nouveau la même nouvelle. A chaque fois, Archer décode ce qui se passe avec un certain retard, ce qui l’empêche d’agir comme il le souhaiterait. On pourrait parler de victime consentante.

Contrairement à Proust, tout le roman baigne dans une atmosphère de nostalgie et de poésie incomparable, émouvante, poignante – j’avoue avec une certaine honte que pour cette raison, je mets Edith Wharton devant Proust, au moins jusqu’au Temps Retrouvé. 

L’atmosphère rappelle par moments, je ne sais pourquoi, celle du Grand Meaulnes. Ou plutôt si, je sais pourquoi: parce que le roman peut se lire à deux niveaux. Entre Newland Archer et Mme Olenska, il s’agit d’une histoire très courte et inachevée. Tout œuvre poétique résulte d’une transfiguration et dans le Grand Meaulnes, l’histoire réelle du héros est, on le sait, celle d’un échec amoureux, d’un amour qui n’a jamais commencé, Alain Fournier ayant simplement croisé dans Paris une jeune femme qui a refusé ses avances. Je fais l’hypothèse que la Madame Olenska, qui fuit à Paris (comme Edith Wharton l’a fait) par idéal,  pour éviter que son amant ne trahisse sa femme, l’amitié, la société new-yorkaise…, c’est Edith Wharton elle-même. Edith Wharton qui se décrit de façon sublime et émouvante, “différente”, comme elle aurait souhaité que l’homme qu’elle aimait la vît. Et que Newland Archer, comme beaucoup d’hommes, n’a simplement pas voulu rompre son mariage par simple respect des conventions et peur sociale, parce qu’il n’était pas assez amoureux. Ainsi, comme Mlle de Galais, Newland Archer n’est peut-être qu’un fantasme sans réalité, il s’agit, de façon infiniment banale et horrible, d’un amour non réellement partagé. Le soit-disant comportement vertueux de Newland tient au mieux du manque de courage, au pire de l’indifférence. Edith Wharton, comme Alain Fournier, le sait sans vouloir l’exprimer clairement au lecteur et au-delà de l’analyse sociale, remarquable, la lumière poétique, tragique, douce-amère du roman provient de cette transfiguration: rendre idéal un amour qui n’a pas été.

Le seul défaut de ce programme ? La traduction française indigente (pourtant prescrite par le programme !) chez Garnier Flammarion. Indigente parce qu’elle omet des passages entiers – environ ¼ de l’œuvre a été expurgée dans le plus pur esprit “Reader’s Digest”. Les élèves ne liront pas Edith Wharton mais une œuvre différente, inférieure et moins subtile que l’œuvre originale. J’espère que les profs de français rectifieront et utiliseront une traduction intégrale. L’anglais d’Edith Wharton est trop complexe pour 99% des élèves de prépa mais une telle œuvre justifierait une collaboration avec les professeurs d’anglais pour que des passages puissent être travaillés en VO.

Quoi qu’il en soit, le programme de Français des deux dernières années permet aux ingénieurs qui seront capables de le recevoir de comprendre le monde et d’y avoir un impact positif qui va au-delà de la simple et facile “dénonciation gauchiste du système capitaliste”. On a vu récemment des ingénieurs d’Agro Paris Tech refuser leur diplôme au nom d’une remise en cause bien-pensante et convenue de “l’ordre capitaliste”. Le programme de français donne aux ingénieurs  les armes pour résister intellectuellement à cette propagande, que ce soit au niveau de la compréhension profonde de ce qu’est le travail, la liberté individuelle, la pression sociale, la propagande politique intense à laquelle ils ont été soumis, malheureusement via l’école, dès leur plus jeune âge. Au moment où le niveau s’effondre, tous les espaces gagnés sur l’obscurantisme sont bons à prendre.

  1. Mensonge romantique et vérité romanesque ↩︎
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De Voltaire à Robespierre, retour sur une mise en Cène polémique 27 juillet 2024

Par Thierry Klein dans : Politique.
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Deux scènes de la cérémonie d’ouverture des JO ont concentré l’essentiel de la polémique.

La première, c’est le détournement de la Cène, de Léonard.

Dans la Cène de la Cérémonie d’ouverture, Jésus est remplacé par un femme obèse, dûment entourée d’une auréole-diadème pour lever toute ambiguïté. Le metteur en scène a respecté la composition initiale (4 groupes de 3) du tableau mais tout est en quelque sorte nié et inversé. Les apôtres sont remplacés par une brochette de personnages noirs, trans, queer, femme à barbe. L’apôtre Thadée lève le bras gauche au lieu du droit, etc.

Dans certains pays, le blasphème est toléré, mais le tolérer, c’est déjà le reconnaître, peser le droit des religieux à ne pas se sentir offensés, à défendre leur vision de Dieu contre celle des athées – le rapport de force étant par nature instable et pouvant toujours évoluer en défaveur des athées. En France, nous avons eu beaucoup d’avance : “la République ne reconnaît aucun culte” (loi de 1905, article 5) et c’est une très bonne chose. Ce n’est pas que le blasphème est toléré, c’est qu’il n’est au sens propre, pas reconnu. Dieu n’est pas une entité juridiquement opposable (ou alors, il n’a pas d’ayant droit reconnu). Circulez, y’a rien à voir.

Ceux qui s’offusquent devant l’image détournée de la Cène sont donc coincés. Ces droitards sont souvent les mêmes qui ont défilé en faveur des caricatures de Charlie-Hebdo et si leur indignation est sélective, c’est évidemment parce qu’ils ne défendent la laïcité que lorsqu’elle s’en prend à l’Islam. Les voilà donc catalogués racistes (islamophobes) et conservateurs (défense de la religion catholique), voire incultes (le tableau initial de Léonard est lui-même volontairement et agressivement anachronique, les apôtres étant situés au sein d’un décor Renaissance, il n’y a donc aucun péché, juste un clin d’oeil, à le détourner lui-même à nouveau).

Un droitard – ou même un gauchiste tendance Jaurès, c’est aujourd’hui souvent la même chose – pourra toujours rétorquer que l’attitude du metteur en scène n’est pas particulièrement courageuse. S’en prendre au catholicisme n’est pas risqué, c’est même tendance en France, depuis au moins Molière. Un tel détournement appliqué à l’Islam aurait engendré des troubles planétaires et aurait donc été bien plus subversif, mais après tout, on est dans le domaine de liberté de l’artiste: à lui de choisir sa cible. Et la Religion est une cible.

Mais ce faisant, on méconnaît profondément la cible de Jolly qui n’est pas la religion, mais bien le catholicisme. Ce n’est pas la Religion, opium du peuple, qui est attaquée au nom d’une entreprise d’émancipation universaliste d’inspiration Voltairienne ou marxiste, mais le catholicisme. Ce n’est pas par hypocrisie ou par crainte mais bien par conviction que seul le catholicisme est attaqué. Le catholicisme représente tout à la fois la Bourgeoisie, la blanchité, le capitalisme, les cisgenres, la France périphérique, le colonialisme, la réaction et en tant que tel, il est opposé à toutes les aspirations du bloc islamo-gauchiste: prolétariat diversité, inclusivité (qui exclut), théorie du genre, France des villes et discours intersectionnel décolonial. Dans cette lutte, l’Islam est préservé, il est même un allié, en tant que religion des prolétaires et des colonisés. Il n’y a plus aucune aspiration universaliste dans cette représentation de gauche. Elle est simplement cathophobe. La laïcité sert d’alibi à l’intolérance religieuse crasse, tribale.

Ceux qui ont aimé comme ceux qui ont détesté ont parfaitement senti tout cela. Nulle hypocrisie. On s’en est pris volontairement aux cathos, pas aux religions dans leur ensemble. Intégristes et athées, il faut les lire de façon littérale, au premier degré.

Le deuxième tableau est celui de Marie-Antoinette décapitée, scène crue et macabre où on voyait le coup coupé de Marie-Antoinette tenant dans sa propre main sa tête qui parlait. Tableau rouge sang mais dans un style peu réaliste – et Marie-Antoinette sourit – pour en atténuer l’horreur.

Il reste que dans une cérémonie presque totalement dénuée d’Histoire au sens grandiose du terme, le seul personnage marquant de l’histoire de France pour le réalisateur, Thomas Jolly, assisté de l’historien officiel de la Cour de gauche, Patrick Boucheron, c’est la guillotine, la Terreur et toute la radicalité qui va avec. Robespierre (récemment réhabilité par Mélenchon et Antoine Léaument) ou Staline plutôt que de Gaulle, Napoléon ou même Jaurès. Eugénie Bastié a finement résumé la situation en parlant de “Puy du Fou woke”.

Là encore, les politiques ne s’y sont pas trompés. Aurélien Saintoul, député LFI et St-Just au petit pied lors des commissions parlementaires anti-Bolloré a adoré le tableau de Marie-Antoinette et la “liberté d’expression” dont a fait preuve Thomas Jolly. Marion Maréchal, moins. Et même Sandrine Rousseau a changé de vision sur les Jeux !

Cette magnifique cérémonie, profondément française malgré tout, allant même jusqu’à une forme de ringardisme kitsch assumé puisqu’elle tenait aussi de l’Eurovision (même si là c’est la France qui gagne), de Champs-Elysées (le premier Champs-Elysées post Drucker, mais la bande son a été intégralement respectée), de Maritie et Gilbert Carpentier (en un peu plus long et beaucoup plus cher qu’à l’époque), est la meilleure et la pire qu’un réalisateur de grand talent pouvait réaliser quand en même temps il laisse libre cours à son idéologie haineuse, intolérante, raciste – et en toute bien-pensance.

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A propos des élèves sous notés du Lycée juif Yabné. 12 juillet 2024

Par Thierry Klein dans : Non classé.
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Les données fournies par l’Education Nationale contredisent ses propres conclusions. Sur les 28 élèves ayant eu une note inférieure à la moyenne (graphique ci-dessous), 22 viennent de Yabné (soit 80%), alors que Yabné ne représente que 42% des élèves (72 / 169). Yabné est un très bon lycée, en général largement supérieur au niveau du public local: on aurait attendu bien moins de 42% de « mauvais » élèves.

Le délai de réponse inférieur à 24h du Ministère est aussi tout à fait inhabituel pour qui connait l’Education Nationale. Tout laisse à penser que la Ministre s’est « saisie » après avoir déjà eu en main un premier rapport « positif » de ses équipes (l’affaire était sortie depuis 8 jours). La forme avancée du « pas de vagues » : on communique de façon rapide pour éteindre l’incendie mais on continue à détourner le regard.

A ce stade, il importe de corréler ces notes 1) au notes du bac en maths et physique des 22 élèves et 2) à leur niveau réel en maths et physique d’après leur bulletin. S’il y a anomalie (ce dont je suis presque certain), enquêter sur le contenu ayant été abordé en grand oral et sur le profil politique des profs.

Le drame dans lequel sombre le pays est le suivant : sur Twitter, tous les comptes pro-palestiniens, antisémites, EELV et LFI (largement confondus) prennent le parti du Ministère au nom de « l’auto-sémitisme », terme censé dénoncer le tropisme juif à se victimiser en toutes circonstances pour obtenir des avantages. A l’inverse, les élèves sont soutenus a priori par toutes les associations juives et pro-Israel (largement confondues). Personne ne raisonne et les arguments étant symétriques, un observateur neutre aurait tendance à renvoyer les parties dos à dos.

Suis-je donc aussi victime de cet esprit de clan, que j’abhorre pourtant, quand je trouve que les données aujourd’hui en notre possession corroborent la thèse des élèves plus qu’elles ne l’infirment ? L’avenir le dira, du moins je l’espère.

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Bienvenue dans la 6ème République 5 juillet 2024

Par Thierry Klein dans : Politique.
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J’ai fait un petit calcul.

En bleu le nombre de sièges par parti si l’élection s’était jouée à la proportionnelle d’après les résultats du 1er tour.

En orange, les prédictions des sondages actuels. A la marge d’erreur des sondages près, les 2 colonnes sont identiques.

Qu’est-ce que cela signifie ?

Que du fait de la stratégie de désistement « Front Républicain », l’Assemblée « tend » vers les résultats du 1er tour. Tout se passera comme si l’assemblée était issue d’un mode de scrutin proportionnel à un tour.

On a changé de République et deux l’ont parfaitement compris: Mélenchon, qui appelle ce changement de ses vœux depuis 10 ans et Glucksmann, qui ce matin, a justement comparé l’assemblée au parlement européen (issu du scrutin proportionnel à un tour) et a souhaité un nouveau mode de fonctionnement plus « collaboratif », « sur le mode du parlement européen ».

Dans la réalité, soit LFI ne votera aucun projet qui n’est pas dans son programme. La situation sera bloquée puisqu’on ne pourra dégager aucune majorité. Soit LFI obtiendra des concessions exorbitantes et imposera des lois très à gauche que personne ne souhaite (sur le mode de fonctionnement, par exemple, du gouvernement israélien).

Bienvenue dans la 6ème République.

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La France ne s’effondrera pas demain, elle s’est déjà effondrée 29 juin 2024

Par Thierry Klein dans : Politique.
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A tous ceux qui vivent l’arrivée possible du RN au pouvoir comme un effondrement, je rappelle simplement que le grand psychanalyste Winnicott décrit la crainte de l’effondrement comme la crainte d’une catastrophe déjà arrivée.

La réaction de défense du patient – la névrose ou la psychose – n’a pas d’autre objectif que de cacher la réalité suivante : dans le passé du patient, l’effondrement tant redouté a déjà eu lieu. Le patient vit la même situation que les héros de l’Enfer de Sartre : Il redoute l’enfer alors qu’il y vit ; ce faisant, il vit un enfer sans avoir le moins du monde conscience d’y être. Et le travail thérapeutique du médecin vise grosso modo à lui faire comprendre alors que « le malheur, c’est maintenant ! » (vaste programme).

Que redoutent donc ceux qui luttent contre l’effondrement ? Si je prends l’exemple de l’antisémitisme, il est facile de le voir. La réalité, c’est que l’antisémitisme est déjà de retour. Non pas sous sa forme historique, Célinienne, Maurrassienne, mais réimporté et puissamment renouvelé en France via l’immigration qui a débuté dans les années 60. Les mêmes qui crient au scandale à propos de l’antisémitisme « historique » du RN détournent pudiquement les yeux quand il s’agit d’antisémitisme arabo-musulman. S’ils crient si fort au scandale, c’est JUSTEMENT parce qu’il ne faut pas regarder cette vérité en face. Les pauvres, on pourrait les traiter d’islamophobes. Couvrez donc cet antisémitisme que je ne saurais voir.

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Pas une tribune pour le RN…

Par Thierry Klein dans : Politique.
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10 tribunes. Entre hier et aujourd’hui, je recense pas moins de 10 tribunes de « citoyens engagés appelant à voter contre le Rassemblement National ».

Des collectifs de personnalité (Libé), les auteurs de BD (qui emmerdent le RN), le Collège de France, la RATP (!), Le Rock (qui emmerde le RN), des universitaires, le Conseil Scientifique de l’EN et même des chefs d’entreprise pour le NFP (Libé) ! Et bien sûr des sportifs.

Tout citoyen, tout collectif de citoyens est fondé à donner son opinion en démocratie et ces tribunes n’ont rien de choquant. Ce qui est choquant, c’est qu’alors que le RN va faire demain entre 30 et 40% des voix, vous ne trouvez pas la moindre tribune EN FAVEUR du RN. Il n’y a pas 10 personnes un peu connues qui ont jugé bon de rédiger un petit communiqué en commun pour dire pourquoi elles voteront RN.

Cette unanimité apparente est le vrai problème démocratique.


Conseil Scientifique de l’EN : https://www.lemonde.fr/…/lorsque-les-ideologies…

Collège de France : https://www.liberation.fr/…/elections-legislatives-le…

Les ingénieurs des grandes écoles (en écriture inclusive) : https://www.humanite.fr/…/nous-ingenieur-es-rejoignons…

La RATP : https://www.lejdd.fr/…/legislatives-la-ratp-menace-de…

Des universitaires : https://www.liberation.fr/…/legislatives-luniversite…

Le rock emmerde le RN : https://t.co/gqcFPmw0K1

Les auteurs de BD (« plus au temps de Tintin au Congo !) : https://www.francetvinfo.fr/…/legislatives-2024-des…

Les étudiants de l’école du Louvre…

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