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Le coût d’usage d’un écran interactif est devenu inférieur à celui d’un tableau interactif ou d’un vidéoprojecteur interactif 14 décembre 2015

Par Thierry Klein dans : Speechi.
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Cela ne se sait pas encore, mais un écran interactif est d’ores et déjà, à l’usage, plus intéressant financièrement qu’un vidéoprojecteur interactif.

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Un vidéoprojecteur interactif, sur une durée de 5 ans, va coûter environ 1 500 € (achat) + 500 € (lampes / filtres à remplacer) + 300 € (interventions diverses de maintenance) + 500 € (installation), soit environ 3 000 €, c’est à dire 600 € / an avec de multiples désavantages par-rapport à l’écran interactif:

  • qualité d’image moyenne, qui n’a rien à voir avec celle d’un écran interactif
  • risques d’éblouissement (élèves, professeurs)
  • ombre portée (même en focale ultra-courte)
  • qualité d’image non constante (car la lampe vieillit de façon continue jusqu’à sa dégradation complète)
  • fiabilité moindre que celle d’un écran interactif (et donc plus de jours de panne)

Un écran tactile de 84″” tels que ceux que nous proposons, sous Android, va coûter sur 10 ans, environ 6 500 € (achat) + 500 € (installation), soit 700 € / an.

– Un écran interactif de 75” : environ 540 € / an

– Un écran interactif de 65” : environ 370 € / an

– Un écran interactif de 55″ : environ 270 € / an

Pourquoi sur 10 ans ? Parce que les écrans interactifs sont munis d’une dalle LED qui va durer, en moyenne, 50 000 heures (contre 3 à 6 000 heures pour la lampe d’un vidéoprojecteur). 50 000 heures, c’est environ 30 ans d’usage à raison de 8 h / jour. Et la qualité de la dalle, donc de l’image,  va rester constante (pas de vieillissement).

Beaucoup d’écoles ne peuvent pas investir aujourd’hui dans un écran interactif car leur investissement est limité, mais si elles regardaient le coût d’usage, on voit dans le graphique ci-dessous qu’elles devraient le faire, au moins pour toutes les tailles jusqu’à 75” (suffisant pour une salle de classe).

Les entreprises devraient systématiquement investir dans un écran interactif plutôt qu’un vidéoprojecteur. D’abord, le gain d’usage, qui joue directement sur la qualité de présentation, est incomparable. Ensuite et surtout, les écrans interactifs sont d’ores et déjà moins chers que les tableaux et vidéoprojecteurs interactifs – et les entreprises peuvent facilement lisser leur investissement, via un leasing ou un emprunt.

Financièrement, le vidéoprojecteur interactif n’est plus intéressant que pour les images de diagonale supérieure à 84”. Il existe une plage (grosso modo de 85 à 110”) où le coût d’usage d’un écran interactif reste plus élevé : ce sont les seules dimensions pour lesquelles le vidéoprojecteur interactif peut se justifier, en dépit de sa faible qualité. Car au delà de 110”, l’image est trop grande pour être rendue interactive (si vous mesurez 1,75 m, vous n’arriverez plus à atteindre le haut de l’écran).

(Voir aussi mon article de 2009 où j’annonçais la fin à venir du tableau blanc interactif fixe. Nous y sommes).

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Les fabricants de tableaux blancs interactifs sont morts (et c’est mérité !) 17 novembre 2015

Par Thierry Klein dans : Speechi.
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Un échec industriel

Dinosaure

Les principales marques de tableaux interactifs qui existaient quand j’ai lancé Speechi en 2004 ont soit disparu, soit été rachetées à cause de la faiblesse de leurs résultats (Interwrite, Promethean), ou recherchent un acquéreur pour des raisons similaires (Smart).

Même eBeam, marque pour laquelle j’ai évidemment la plus grande tendresse et aussi une grande admiration, n’a pas réussi au niveau mondial comme cela a pu être le cas en France, où notre part de marché est de l’ordre de 30 % (pas mal quand même pour un petit TBI qui s’est fait traiter de gadget la première fois que nous l’avons montré au “spécialiste” en charge du domaine à l’Education Nationale).[Je me souviens encore des remarques que nous avons dû subir en 2004:
– “C’est trop léger, dans une classe, il faut du lourd”. Alors que c’est exactement le contraire.
– “Ca ne marchera pas sur le long terme, ça sera volé” (Résultat des courses: moins de 2 vols par an).
– “Ca tombera en panne” (Ca tombe tellement peu en panne que nous avons fini par le garantir 7 ans…).
– “Ca ne peut concerner que quelques profs nomades” (Résultat: avec plus de 60 000 unités vendues en France, ce TBI est sans doute le plus utilisé).]

Quelles sont les raisons de cet échec ?

Manque de vision technologique

Les tableaux interactifs n’ont jamais révolutionné l’enseignement, comme les slogans publicitaires ronflants tentaient de le faire croire. Ils sont restés de simples moniteurs branchés sur des PC. Le virage des tablettes n’a jamais été pris par les constructeurs de TBI. J’écrivais en 2012:

“Il est impossible pour un enseignant d’arriver en cours avec son IPAD, de le connecter (sans fil) à son tableau interactif et à son vidéoprojecteur et de faire cours comme il peut le faire avec son PC. Une telle application paraît pourtant “évidente”.”

et ceci reste, de façon surprenante, toujours vrai aujourd’hui. L’industrie a été tout bonnement fainéante.

Un modèle économique court-terme

Les principaux leaders du tableau interactif étaient financés par du capital risque ou par la bourse, parfois par les deux (Smart, Promethean). Ce modèle aide certes le développement des entreprises mais il est aussi très “court terme”, avec une trop grande pression sur les résultats immédiats de l’entreprise et peu stable quand le marché se retourne (ce qui a été le cas en 2011 / 2012).

Au moment où l’entreprise a changé de main, Promethean valait environ 100 millions de dollars, soit 7 à 10 fois moins qu’à son apogée, quelques années plus tôt. Smart vaut sans doute aujourd’hui environ 60 millions de dollars, soit environ 15  fois moins qu’en 2010. Quand une entreprise perd autant de valeur, il est très dur de conserver son savoir-faire (les meilleurs éléments sont partis). Il est parfois très dur de la faire tout simplement survivre.

L’industrie du TBI est peut-être une industrie morte d’avoir eu trop d’argent, trop tôt.

Une vision de l’éducation et de l’Homme indigne des enjeux

L’objectif initial était (et reste !) d’utiliser les technologies numériques pour améliorer le niveau des élèves, mais les études montrent aujourd’hui, de façon constante, que les tableaux interactifs n’améliorent pas le niveau des élèves. Les tablettes numériques, utilisées par les élèves comme des outils de jeu, ne font probablement que baisser leur niveau – ce qui n’empêche pas les gouvernements d’investir, un peu partout, dans de coûteux programmes d’équipement des élèves.

Tout ceci n’empêche nullement l’industrie du numérique de continuer à s’auto-congratuler, de se présenter comme indispensable et de multiplier les promesses éducatives – promesses non tenues depuis dix ans.

Le fait d’échouer n’est en soi pas honteux. La recherche sur le cancer existe depuis 100 ans et le cancer n’est toujours pas vaincu. Ce qui est plus grave (et même parfois honteux), c’est que l’industrie numérique ne s’est pas donné, d’une façon générale, les moyens de ses ambitions.

  • Elle a utilisé des moyens de lobbying agressifs, allant peut-être jusqu’à la corruption (le cas des tableaux blancs interactifs au Canada). Les techniques employées (débauchage de membres de cabinets ou de fonctionnaires influents) n’ont pas été limitées au seul Canada.
  • Elle a systématique caché la faible valeur ajoutée des TBI et pire, a financé des études favorables (comme a pu le faire l’industrie du tabac). Voir “Le bilan noir du tableau interactif”.
  • Elle ne s’est jamais dotée de techniques ou d’indicateurs fiables permettant d’évaluer sa performance (ce qui, au fond, constitue l’aveu criant qu’elle n’y croit pas ou qu’elle s’en fout royalement !).

Divertissement contre savoir. Comme les tableaux interactifs ne pouvaient pas être présentés sous un angle pédagogique, on a plaidé “la fin de l’ennui”, “la modernité dans les écoles” – arguments qui ne veulent rien dire mais qui sont visiblement bien acceptés politiquement si on en juge par ceux fournis pas le gouvernement pour justifier la réforme du collège. L’industrie s’est noyée dans le ludique au détriment du savoir (et ça continue avec l’introduction des tablettes). Il me semble particulièrement significatif que Promethean ait été racheté par une société (chinoise) qui est un acteur important… du jeu en ligne !

Peu d’avantage technologique

Les principes techniques sur lesquels reposaient la technologie des TBI fixes étaient simples et les points clés complexes à protéger. Depuis 2005-2010, les usines chinoises produisent des TBI qui ont été d’abord de pâles copies, puis se sont améliorées. La plupart des TBI que vous achetez aujourd’hui, même quand il s’agit de marques européennes ou nord-américaines, sont produits en Chine. Et on assiste donc au paradoxe suivant, pour moi désolant, et que je vais vous laisser méditer avant d’aller prendre un repos bien mérité:

Alors que leur plus-value pédagogique est le plus souvent nulle ou non observable, les sommes dépensées par les états occidentaux au nom de l’école numérique (plans tablettes, écrans interactifs, vidéoprojecteurs interactifs) ont contribué au développement de l’industrie et de la R&D chinoise.

Que faudrait-il faire ?

En fait, il faudrait faire exactement le contraire.

Là encore, on n’en prend pas, c’est le moins qu’on puisse dire, le chemin. Et pourtant, malgré tous ces problèmes, ces excès, ces erreurs, il n’y a pour moi aucun doute: le numérique va changer profondément l’éducation dans les années à venir et je pense que ce sera vraiment pour le meilleur.

Je suis comme le vieux chanteur d’Aznavour (veste bleue en moins): j’y crois encore !


(1) Rafi Holtzmann, président de Luidia, dont j’ai souvent parlé dans ce blog, me semble avoir été le plus “proche” de cette vision, sans cependant la finaliser.

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Le billet que j’aurais préféré ne jamais écrire 15 novembre 2015

Par Thierry Klein dans : Speechi.
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Paris 13 novembre 2015


Paris 13 novembre 2015
Lutter contre le terrorisme, c’est, à court terme, une affaire de police (chez nous) ou militaire (en Syrie), de façon à ce que les entreprises terroristes ne puissent aboutir, faute de moyens ou d’armes.

Mais à long terme, pour vaincre ce fanatisme suicidaire, je ne vois que l’école. Car, au-delà de leur religion, je fais le pari que tous les kamikazes d’hier, comme ceux de Charlie  partageaient  la même ignorance crasse, sans laquelle leur endoctrinement serait impossible.

Ils ne sont pas courageux, c’est important de le répéter, car il n’y a pas de courage sans connaissance assumée du danger. Ils sont au sens propre inconscients, car ignorants.

Quelques heures de Molière, de Rousseau, de Montesquieu (je ne parle même pas de celui de L’esprit des lois, juste de celui des Lettres persanes)  ou de Voltaire, quelques cours de sciences ou de maths en plus leur auraient probablement évité de se transformer en monstres.

Une école qui re-fonctionne partout, y compris dans les banlieues, qui enseigne “simplement”, réellement et fièrement les matières fondamentales, qui refuse le compromis (c’est à dire toute pression religieuse sur le contenu de l’enseignement). Une école qui aurait pour objectif principal de développer le savoir (ce qu’elle sait faire) et non pas de lutter contre des inégalités supposées de classe ou de sexe (à chaque fois qu’elle a essayé de le faire, elle les a augmentées) ou d’implémenter des projets de société langue-de-bois comme le “vivre-ensemble” (qui semble devenir petit à petit “mourir ensemble”).

Une école qui apporte aux enfants à tout prix l’usage de la Raison, de la critique, de l’analyse, de l’humour: les meilleurs remparts contre les attentats-suicides.

Voici l’école qu’il nous faut, à tout prix, réinventer. Je ne sais pas si c’est encore possible.

Je prie, ce soir, pour une école laïque, publique et obligatoire.

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René Girard, Kundera, Galilée et le Progrès : l’avenir imprévu d’une illusion 6 novembre 2015

Par Thierry Klein dans : René Girard.
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Il avait été finalement, bien tardivement, élu à l’Académie française. Mais il n’a jamais pu enseigner en France. Dès le départ, il faut donc signaler ceci: l’Université française a fait subir à René Girard ce que l’inquisition catholique n’a jamais imposé à Galilée – une censure quasi totale.

Un des grands découvreurs de l’Humanité, au même titre que Newton ou que Freud, a finalement enseigné à Stanford où j’ai eu la chance, au début des années 90, de suivre quelques uns de ses cours. Son oeuvre écrite est extrêmement claire et articulée autour de quelques découvertes fondamentales, telles que le désir mimétique ou les mécanismes victimaires à l’oeuvre dans la violence. C’est un des seuls grands penseurs modernes qu’on peut lire presque sans aucune référence et sans explication externe. Vous ne pouvez pas faire ça, par exemple, avec Freud qui invoque à tout moment « l’expérience thérapeutique », ni avec Bourdieu, Derrida ou Lacan qui, sans formation préalable appropriée (et parfois même avec !), sont presqu’incompréhensibles.

« La Violence et le sacré » et « Des choses cachées depuis la fondation du monde » exposent l’essentiel de ses théories tout en effectuant une lecture critique et comparative de la psychanalyse, de l’anthropologie et des religions. Les autres œuvres philosophiques seront ensuite des variations sur les mêmes thèmes ou des illustrations de ces thèmes. Pour ceux qui s’intéressent à la littérature, René Girard est l’auteur d’un des meilleurs livres jamais écrits sur le roman « Mensonge romantique et Vérité Romanesque » et du meilleur livre que j’ai pu lire sur Shakespeare « Les feux de l’Envie ». « Mensonge romantique », où il découvre à travers la littérature le désir mimétique et le lyrisme romantique (que Kundera appellera plus tard « le Kitsch »), est une analyse structurale comparative de quelques grands romans (de Don Quichotte à Flaubert) que vous ne lirez plus jamais de la même façon après Girard. « Les feux de l’Envie » est une recherche systématique brillantissime des “indices” de la théorie mimétique dans l’oeuvre de Shakespeare et de Joyce.

Le renversement de la preuve religieuse

René Girard, c’est surtout celui qui “renverse la charge de la preuve” en matière de religion dans notre monde moderne. Dans “L’avenir d’une illusion“, Freud montre le lien entre toutes les religions : elles sont des illusions. Le sorcier qui danse pour faire pleuvoir est dans l’illusion (même s’il pleut après sa danse, le lien entre la danse et la pluie qui s’ensuit ne peut être scientifiquement établi). Une “illusion” n’est pas une “erreur”. Vous ne pouvez pas, vous non plus, montrer que le sorcier n’a pas fait pleuvoir. Mais une fois que Freud vous a parlé du sorcier dans la religion primitive, et rapproche son comportement de celui du croyant ou du prêtre dans les religions bibliques, vous constatez que tous sont indubitablement dans l’illusion et évidemment la crédibilité du croyant moderne en prend un sacré coup. Freud montre aussi que les religions sont bâties sur des histoires de meurtre qui fonctionnent exactement comme dans les mythes. Pas de raison, donc, d’y croire ni plus ni moins qu’on croit aux mythes.

L’entreprise de Freud est une des formes les plus réussies, au final, de dénigrement de toutes les religions, non pas en montrant l’inexistence de Dieu – cette inexistence est du domaine de l’indémontrable – mais en rapprochant de façon extrêmement éclairante les mécanismes communs à toutes les religions, ce qui rabaisse finalement les religions du Livre au rang de pure sorcellerie (avec forte tendance névrotique en sus).

Durant toute la durée du XXème siècle, la révélation freudienne a constitué la théorie la plus convaincante en matière d’interprétation du mécanisme religieux. Les esprits les plus éclairés, les plus indépendants ont été naturellement non religieux, un peu comme au XVIIème, les mêmes esprits étaient coperniciens. Ces mêmes esprits éclairés ont été aussi progressistes (Kundera rappelle que les communistes tchèques rassemblaient au départ la meilleure partie de la population du pays, la plus dynamique, la plus éclairée, la plus avancée). Opposition à l’Eglise, volonté de progrès, avance intellectuelle face à des esprits conservateurs la plupart du temps peu éclairés – tout ceci a été – et est encore – lié non seulement depuis Freud, mais depuis Galilée. Qu’on soit croyant ou pas, l’analyse de Freud s’impose à tout être pensant.

Mais René Girard, qui est un penseur “chrétien”, découvre alors la différence structurale fondamentale entre les religions tirées de la Bible et toutes les autres religions, ainsi que tous les mythes. Cette différence, c’est que les mythes (ou les “fausses” religions) se réduisent à des traces de meurtres ou de massacres racontés par les meurtriers (les “forts”), alors que la Bible effectue une révolution copernicienne en prenant dès l’origine (le meurtre d’Abel) le point de vue des faibles et en les défendant. La Bible et tous les mythes parlent bien de la même chose – comme Freud l’a montré – mais pas de la même façon. Et c’est ce point de vue qui rend les religions du Livre unique et les différencie du mythe. Qu’on soit croyant ou pas, l’analyse de Girard est incontestable et aujourd’hui, si vous êtes un intellectuel, vous êtes forcé de reconnaître qu’il y a une spécificité biblique (cette spécificité est particulièrement inconfortable à vivre si vous n’êtes pas croyant).

Bien sûr, vous trouverez toujours des intellectuels qui n’adhèrent pas à cette analyse, mais vous pouvez les ranger dans la même catégorie que ceux qui rejetaient Freud a priori sans l’avoir bien lu: ce sont, comme le “Simplicio” de Galilée, de purs conservateurs qui disent aimer la connaissance mais ne recherchent au fond que la confirmation de de leurs idées préétablies. Beaucoup d’intellectuels français sont dans ce cas (Najat Vallaud-Belkacem ne les traitera jamais de « pseudo-intellectuels », eux). On peut même parler de mouvance majoritaire – et c’est une des raisons pour laquelle la reconnaissance de René Girard a été si tardive et s’est d’abord effectuée à l’étranger.

D’une certaine façon, René Girard a lui-même amplifié le phénomène de rejet en revendiquant le caractère chrétien, voire hagiographique de son oeuvre, avec une certaine délectation de polémiste. Il y a d’ailleurs une évolution entre les premiers ouvrages, qui sont présentés comme des analyses objectives conduisant à une spécificité biblique mais où le côté apostolique de l’auteur est masqué et les ouvrages plus récents où l’aspect hagiographique est plus clairement revendiqué. En outre, l’analyse de Girard conduit à privilégier nettement la religion chrétienne parmi les religions bibliques car René Girard effectue une analyse très poussée et totalement originale de la Passion du Christ présenté comme un exemple particulièrement pur et “révélateur” de la position du Faible. Là encore, la force de l’analyse est indéniable et induit “mécaniquement ” le lecteur à une hiérarchisation des religions où la religion chrétienne serait une sorte d’aboutissement ultime de la religion juive. C’est une thèse classique de l’Eglise qui a conduit des milliers de juifs au bûcher où à la conversion forcée au moyen-âge. L’oeuvre de René Girard est donc naturellement revendiquée par les clans catholiques les plus conservateurs et bornés.

Si Galilée avait eu tort

Pour comprendre le monde d’aujourd’hui, on peut tenter d’imaginer ce qu’il serait devenu si Galilée avait eu tort. Il faut se souvenir que Galilée n’apportait nullement, à l’époque, la preuve de ses affirmations et que ses thèses étaient beaucoup plus contestées que ne l’est aujourd’hui, par exemple, la thèse du réchauffement climatique. Sur certains aspects, Galilée se « plantait » même royalement et ses « Dialogues sur les deux systèmes du monde » fourmillent de graves erreurs, sans parler de leur partialité qui lui a valu sa condamnation. Si Galilée, donc, avait eu scientifiquement tort, sa condamnation serait apparue comme justifiée et la science, ainsi que probablement les sciences humaines, se seraient durablement rangées du côté des religions. Les progressistes (je nomme ainsi tous ceux qui ont foi dans le Progrès, et je les oppose à ceux qui ont simplement espoir dans le Progrès ou qui sont réservés face au Progrès) seraient du côté des religions. Et tout ceci serait, somme toute, dans l’ordre naturel des choses, puisque le progressisme est une foi, c’est-à-dire de façon ultime une position religieuse.

Par opposition, aujourd’hui, les progressistes (ceux qui croient au sens de l’histoire) se situent avant tout à gauche et leur conviction est basée de façon ultime sur l’opposition à la religion, vécue comme un conservatisme (la religion est une illusion nocive, autrement dit, un opium). A droite, les libéraux croient aussi que le progrès est obtenu par le libre jeu du marché mais l’acteur ultime de cette pièce est « l’homo economicus », une sorte d’extra-terrestre improbable dont tous les choix sont de nature économique, autrement dit, un être sans Dieu.

Les notions de Progrès et de croyance sont devenues beaucoup plus fructueuses pour comprendre l’échiquier politique que les notions de droite et de gauche.

Les progressistes, qui se voient comme des opposants éclairés à toute religion, refoulent encore le côté religieux qui vit caché au plus profond d’eux, et une grande confusion en résulte. L’extrême-gauche, la gauche et la droite dite libérale, qui constituent l’essentiel de qu’on appelle « le front républicain » sont avant tout un « front progressiste ». Dans la famille des « conservateurs » (j’appelle ainsi ceux qui ne croient pas au progrès et je rappelle que cette non-croyance a priori, comme la croyance, reste une position religieuse), je nomme la plupart des Verts, une bonne partie de la Droite bonapartiste et le Front National. J’appelle « rationnels » tous ceux qui n’ont qu’une confiance limitée dans le progrès ou qui veulent simplement « jouer pour voir ». Les « rationnels » représentent la majorité des français : problème, ils sont minoritaires à l’intérieur de chaque parti.

Kundera, dans le livre du rire et de l’oubli

:

« Moi aussi, j’ai dansé dans la ronde. C’était en 1948, les communistes venaient de triompher… nous avions toujours quelque chose à célébrer, les injustices étaient réparées, les usines nationalisées, es milliers de gens allaient en prison, les soins médicaux étaient gratuits… Nous avions sur le visage quelque chose du bonheur… Puis un jour, j’ai dit quelque chose qu’il ne fallait pas dire, j’ai été exclu du parti et moi aussi, je suis sorti de la ronde. »

Si vous n’êtes pas « progressiste », l’inquisition vous rattrapera a coup sûr et vous serez traité de « conservateur » – l’injure suprême. Aujourd’hui, tous les rationnels sont perçus comme conservateurs et beaucoup croient même qu’ils le sont, exactement comme (exemple emprunté à Girard), certaines sorcières du moyen-âge étaient convaincues de l’être et donc approuvaient leur propre condamnation. Mais si la croyance de la sorcière en sa culpabilité tient de la pensée magique, elle ne rend pas la sorcière elle-même magique, ni coupable. De même (autre exemple emprunté à Girard), le fait qu’Oedipe croie en sa culpabilité ne le rend pas coupable. Oedipe est, au sens propre, « convaincu de sa culpabilité » mais l’idée qu’il soit, par exemple, responsable de l’épidémie de peste tient du magique. Girard voit ceci. Freud non.

La crise politique actuelle: l’incompréhension du fait que que le progressisme est une religion.

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Retour vers le futur : les prédictions que Marty McFly n’avait pas osé faire sur l’école 20 octobre 2015

Par Thierry Klein dans : Speechi.
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De lorean

Aujourd’hui 21 octobre 2015, Marty McFly et Emmet Brown (“Doc”), les héros du génialissime Retour vers le futur débarquent de l’an 1985 dans la DeLorean. Evidemment, un certain nombre de leurs prédictions n’ont pas été réalisées. Par exemple, ce matin, j’ai fait mes lacets à la main. Puis, quand j’ai essayé le skate-board de mon fils, c’est moi qui ai volé, pas le skate. A midi, si je suis pressé, je ferai réchauffer une pizza mollasse au micro-ondes qui n’aura rien à voir avec le pizza déshydratée du film.

Certaines “inventions” du film existent cependant aujourd’hui (lunettes connectées) ou pas (voitures volantes). On oublie aussi que beaucoup de nouveautés du film ont trouvé leur place à l’école.

Tablette numérique
Visoconférence
TnWii Retour vers le futur
TnWii
  • Les tablettes numériques (comme celles que Biff donne à Marty, ci-dessus) sont visiblement très appréciées de François Hollande, qui a décidé d’en équiper des milliers d’élèves.

Prédire l’arrivée de toutes ces nouveautés, finalement, c’était peut être assez simple. Ce que Marty McFly n’avait pas prévu (le pouvait-il ?), c’est qu’en 2015:

  • On s’apprête à supprimer l’enseignement du Latin dans les collèges au nom de l’égalité.
  • On retire des heures aux cours fondamentaux au profit d’enseignements fumeux sur les éoliennes, le développement durable ou les débats sous forme de caricatures, en présence d’un caricaturiste local. (Je n’invente rien).
  • Comme les classes bilingues de 6ème sont suivies par des élèves qui réussissent, on va les supprimer car cette réussite est injuste.
  • L’éducation au media sera heureusement, selon les nouveaux programmes du collège, “organisée de façon spiralaire“. Et tous ceux qui ne comprennent pas ce que cela signifie sont bien sûr de pseudo-intellectuels.

Je ne sais pas exactement quand ça s’est passé, mais à un moment, j’ai quand même l’impression que Marty et Doc ont réellement endommagé le fameux “continuum espace-temps“.

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Le logiciel le plus important depuis que l’école a été inventée 7 juillet 2015

Par Thierry Klein dans : Speechi.
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Je suis extrêmement fier d’annoncer ce matin la sortie de la nouvelle version de notre logiciel d’évaluation en ligne « Je Lève La Main ». Il s’agit d’une mise à jour majeure, qui va changer l’évaluation des élèves telle que nous la connaissions, telle qu’elle existait depuis l’antiquité.

L’évaluation « dans les nuages », avec un moteur de recommandations.

 
A partir d’aujourd’hui, tous les quiz créés avec « Je Lève La Main » sont partageables dans le nuage. Cela veut dire que chaque enseignant utilisant « Je Lève La Main » peut mettre son quiz à disposition des autres enseignants. Un portail de quiz est donc ainsi créé de façon collaborative, qui rassemble tous les quiz de tous les enseignants.

Quiz recommandés

Les quiz recommandés dans “Je Lève La Main” (version iOS). Dans la colonne de gauche, l’enseignant voit combien d’autres enseignants ont déjà interrogé les élèves avec le quiz considéré.

Un moteur de recommandations a été mis en place, qui va proposer aux enseignants les quiz les plus intéressants compte tenu de leur activité[1].

L’évaluation comparative : le tube à essai pédagogique

 
Grâce à ce moteur de recommandations, tout enseignant pourra interroger sa classe avec un quiz du portail et surtout, il pourra comparer les résultats (de façon totalement anonymisée) avec les résultats des autres classes, un peu partout en France. Il pourra voir si ses élèves progressent plus vite, moins vite que la moyenne. S’ils progressent plus vite, il pourra mettre son savoir-faire à disposition des autres professeurs. Sinon, il pourra s’inspirer des autres. Il pourra aussi, s’il le souhaite, s’organiser avec un autre enseignant pour tester une nouvelle méthode pédagogique.

Nous allons mettre progressivement à destination des enseignants des outils statistiques extrêmement puissants (et programmables) de façon à ce qu’ils puissent réaliser leurs propres « expériences ».

Le but ultime d’un outil tel que « Je Lève La Main » est de donner un cadre simple pour que chaque enseignant (qui le désire) puisse se transformer en chercheur en sciences sociales. A l’heure actuelle, les évaluations mises en place sont lourdes (évaluations nationales), mal adaptées et/ou critiquables dans leur contenu (PISA) et finalement très opaques, dans leur élaboration comme dans leur dépouillement.

La révolution numérique nous permet de démultiplier ces évaluations à l’infini, de les rendre plus légères, plus significatives, plus pertinentes. Elles vont pouvoir partir « du terrain », hors de tout biais idéologique ou politique. Comme nous l’avons toujours fait depuis que Speechi existe, nous allons faire confiance aux enseignants avant tout.

La pédagogie, qui était avant tout un art, devient une science.

 
L’évaluation, qui était jusqu’à présent une science sociale (c’est-à-dire, justement, pas une science ! [2].), vient de rentrer dans le domaine des sciences expérimentales. Il va être possible, grâce à « Je Lève La Main » de tester des idées, des réformes et d’obtenir des retours d’expérience très rapides (de l’ordre de quelques semaines dans la plupart des cas, c’est pourquoi je parle de « tube à essai » pédagogique) permettant de guider les enseignants, les directions des écoles, les rectorats et de façon ultime, je l’espère, les politiques publiques, qui en ont bien besoin.

 La possibilité de tester les idées ouvre, dans l’éducation, un champ de progrès quasiment infini [3].[“Je Lève La Main” est disponible en téléchargement gratuit (pour les écoles) en version iOS, Android ou Web à partir de cette page.]


[1] Il faudra environ 50 000 quiz pour que les propositions soient réellement pertinentes. Soyez patients, nous en sommes aujourd’hui à moins de 10 000 quiz.

[2] Il n’y a science expérimentale (Je cite Descartes dans le Discours de la méthode) que lorsque la démarche conduite permet de trancher entre les théories (par l’expérience) et d’avancer dans la découverte scientifique (en divisant un problème d’apparence complexe en plusieurs problèmes plus simples). C’est bien ce que permet de faire notre logiciel: trancher entre les idées. A partir de Descartes, le progrès scientifique est continu quel que soit le rythme des découvertes.

[3] Les commentaires visant à limiter la mégalomanie de l’auteur seront lus avec une extrême bienveillance. “E pur si muove !”. Le contenu de ce billet a énormément de sens.

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Sur la façon dont le gouvernement communique à propos de la réforme du collège 12 mai 2015

Par Thierry Klein dans : Politique.
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Ce premier billet sur la réforme du Collège  traitera exclusivement de la forme (c’est-à-dire du style de communication employé par le Ministère). Les arguments de fond seront développés dans d’autres billets à venir.

Un des arguments principaux de la Ministre de l’Education Nationale sur cette réforme est que les « pseudo-intellectuels » l’ont mal lue ou même (honte à eux !) pas lue du tout, alors que toutes les informations étant disponibles sur le site de l’Education Nationale,  » il est possible à chacun de les consulter et de se faire sa propre idée en connaissance de cause ».

Une réforme en réalité peu accessible (pour ne pas dire inaccessible).

La réalité est un peu différente. Sur  le site de l’Education Nationale, vous tombez immédiatement sur une suite d’articles de vulgarisation (pour ne pas dire simplistes) et d’infographies (pour ne pas dire bandes dessinées) justifiant la réforme des programmes. Ces articles sont, au sens propre du terme, des articles de propagande puisqu’ils servent à vous vendre la réforme en une page ou deux sans renvoyer, ne serait-ce que sous forme de lien, vers le contenu  précis de la réforme.

Certains liens du site du Ministère renvoient même directement vers le site personnel dédié à la promotion de la Ministre, bref la confusion entre information et propagande est totale.

 

Refore College

Pour accéder au texte intégral de la réforme, j’ai dû, il y a trois semaines, passer quinze bonnes minutes à naviguer sur le site de l’Education Nationale.  Ce qui veut dire que sans un intérêt aigu, de nature presque professionnelle pour le sujet, j’aurais renoncé à chercher le programme et me serais contenté des messages de propagande. J’estime que plus des 95% des visiteurs du site ont fait de même[1] et donc n’ont pas eu accès au texte intégral de la réforme.

Je ne sais pas si cette dissimulation de fait est le résultat d’une volonté politique, d’une simple incompétence ou du besoin inconscient de masquer les textes originaux tellement, nous le verrons dans les prochains billets consacrés au fond de cette réforme, ceux-ci contredisent en tous points les déclarations de la Ministre et les articles d’explication du site de l’Education Nationale.

[Ajout 11 mai :  La grande honnêteté qui me caractérise, probablement couplée au fait que je suis tout sauf un pseudo-intellectuel, m’oblige cependant  à préciser que depuis ce matin, la réforme est accessible en 3 clics à partir du blog des actualités du site.]

Une réforme peu lisible (pour ne pas dire illisible).

Peut-être beaucoup de pseudo-intellectuels n’ont-ils donc pas lu la réforme. Il leur sera cependant beaucoup pardonné car le texte intégral en est, en grande partie, illisible – c’est à se demander si lui aussi n’aurait pas été rédigé par des pseudo-intellectuels !  Je reprends quelques exemples pour la plupart déjà largement publiés dans la presse, car c’est toujours bon de rire un peu.

« traverser l’eau en équilibre horizontal » (en français ancien, signifie « nager »)

«vaincre un adversaire en lui imposant une domination corporelle symbolique et codifée» (en franco-anglais ancien, « match »)

« produire des messages à l’oral et à l’écrit » (en français ancien, signifie écrire et parler)

« aller de soi et de l’ici vers l’autre et l’ailleurs » (intraduisible. La langue française n’est visiblement pas assez riche pour traduire la profondeur insondable de la pensée des rédacteurs du programme).

« l’éducation aux media, organisée de façon spiralaire » (les mots me manquent là aussi pour bien vous faire sentir toute la profondeur du concept. Mais je ne suis probablement qu’un pseudo-intellectuel).

On est bien sûr  ravi de noter que « «l’inflation terminologique doit être évitée» (programme de français). Et on se demande ce qu’il en aurait été dans le cas contraire.

Un texte de réforme sans véritable contenu spécifique.

Personne à ma connaissance n’a encore remarqué ce point : la réforme, telle qu’elle se présente, manque tellement de précision qu’elle ne peut être valablement contredite. 

Dans certaines matières, les textes sont tellement vagues qu’ils ne définissent en fait pas grand-chose. Par exemple, dans le projet de programme pour le cycle 4 du 9 avril et qui ne compte pas moins d’une soixantaine de pages, je vous invite à aller consulter le programme de français (pages 10 à 16) pour constater qu’au final, ce programme n’impose rien au professeur (c’est la liberté pédagogique poussée à son summum). Six pages touffues et jargonnantes sans imposer aucune œuvre spécifique à lire (puisqu’on doit simplement « puiser dans toutes les époques » !).

Et je défie, par exemple, quiconque de pouvoir vérifier qu’en fin de cycle l’élève sait « Mobiliser en réception et en production de textes les connaissances linguistiques permettant de construire le sens d’un texte, le rapport au genre littéraire, à la forme de discours, au type de texte. »

Le cas du programme d’histoire.

Le programme d’histoire / géo s’étend lui sur 5 pages. Nous sommes contents d’apprendre, dans les deux premières que les heureux élèves devront « se repérer dans le temps » et « se repérer dans l’espace ». Ils sauront « comprendre et analyser un document », « raisonner » et « pratiquer différents langages en histoire / géographie » , « coopérer » et « mutualiser ».  La description de ce que signifient exactement tous ces termes prend 3 pleines pages, écrites de telles façons qu’elles pourraient s’appliquer aussi bien à des élèves de licence que de CM1 (autrement dit, ce sont des déclarations d’intention vagues et non spécifiques, qui n’engagent aucun enseignant à rien).

Le programme d’histoire lui-même (thèmes étudiés) tient sur moins d’une page (pour 3 années d’étude !). La moitié des thèmes proposés sont facultatifs.

Au final, si on enlève du programme les déclarations d’intention, les objectifs (si vagues, jargonnants et prétentieux qu’il n’en sont pas), et toutes les parties non spécifiques qui ne définissent absolument rien, la réforme des collèges tient dans cinq à dix pages –elles même très floues et imprécises.

L’Administration au pouvoir

Le fait qu’il n’y ait « rien » dans ce texte, sert un double objectif politique. Celui du Ministre, qui devra non pas enlever des parties du texte mais en rajouter pour neutraliser certaines critiques et arriver à un compromis sans avoir le moins du monde l’air de reculer. Divers points de repli ont visiblement été prévus et Najat Vallaud-Belkacem, depuis une semaine, « consulte » et communique sur le fait que les programmes demandent à être « tout simplement discutés et précisés ».

Celui de l’Administration, qui a écrit ce texte pour son propre compte, dans sa propre langue si caractéristique, et qui de fait dirigera son application. Comme le texte ne dit rien, toute latitude lui est ainsi laissée pour l’interpréter « comme il faut » et orienter la future politique éducative. Les ministres passent, l’administration de la rue de Grenelle reste.

Qui n’a pas d’objectif ne peut pas échouer.

Dans cinq ans, si la réforme s’applique, personne ne pourra jamais prouver son  succès ou son échec puisqu’elle n’aura jamais été réellement définie.

Ainsi, en rédigeant ce modeste billet, j’ai probablement  « fait preuve d’esprit critique », satisfaisant en ceci l’esprit et la lettre du programme d’histoire du cycle  (page 37) mais j’avoue que je ne sais pas si j’ai bien « mobilisé ma sensibilité pour questionner la part du subjectif et la portée intellectuelle et morale des stéréotypes de représentation » (ce qui est pourtant une compétence attendue en fin de cycle 4, p 26).

Je prédis donc sans aucun risque de me tromper que  Ministère et pseudo-intellectuels pourront sans aucun problème continuer à s’invectiver dans les prochaines années.

Non seulement il sera impossible à quiconque de juger du succès de cette réforme, mais il sera aussi impossible, avant trois années complètes, de valider les progrès des élèves. Le cycle 4 porte maintenant sur trois années (5ème, 4ème, 3ème) et donc les programmes tels qu’ils sont définis portent aussi sur 3 années. Le redoublement est devenu presqu’impossible mais ce n’est qu’en fin de 3ème qu’on pourra (peut-être, car rien n’est prévu) constater les éventuels décrochages.

Jamais autant de volonté d’égalité (affichée)  n’aura généré autant d’inégalité de niveau (sur le terrain).

 


[1] Moins de 10% des internautes consultent un résultat qui serait sur la deuxième page de Google. Sur Internet, la technique qui consiste à « noyer » un lien nuisible  sous une multitudes d’autres résultats positifs qui, apparaissant en page 1 de Google vont faire descendre le lien nuisible en page 2 ou 3,  est une stratégie d’e-reputation classique utilisée par les entreprises.
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L’Education Nationale s’éclipse 19 mars 2015

Par Thierry Klein dans : Speechi.
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Ce matin, l’Education Nationale vient de recommander aux directeurs d’établissements scolaires de ne pas sortir les élèves au moment de l’éclipse.

L’éclipse nous ramène à la grande histoire des sciences. C’est un des premiers phénomènes astronomiques que l’Homme a été capable de prédire, c’est Galilée qui le premier observe les astres à la lunette. Les lois de Copernic, Kepler puis Newton sont confirmées par les observations sur les planètes les plus précises possibles à l’époque, la relativité générale d’Einstein est confirmée par l’observation de l’éclipse de 1919.

Elle nous ramène à l’histoire des religions. Il y a bien sûr Galilée, mais surtout, à partir du moment où on prédit le moment de l’éclipse, où on l’explique scientifiquement, il n’y a plus nécessairement d’intention divine derrière le phénomène naturel et c’est tout un pan des superstitions naturelles des sociétés qui s’écroule puisque “Les planètes ne parlent plus” (Lacan).

Elle nous ramène à l’histoire des sciences humaines en remettant la terre – et l’Homme – à leur place, via Copernic. De l’idée que la terre n’est pas au centre de l’univers part celle qui fait de l’homme une espèce animale fruit de l’évolution comme les autres (Darwin), puis Marx et Freud (qui montrent que l’homme n’est pas maître à son propre bord), puis l’ensemble des sciences sociales (qui, de façon paradoxale, conduisent actuellement aux positions obscurantistes que prend l’Education Nationale aujourd’hui).

Car il s’agit bien de positions obscurantistes, au sens d’ailleurs très littéral du terme. De la maternelle à l’enseignement supérieur, il n’y a sans doute pas de phénomène plus facile à observer, plus riche à commenter, plus propre à susciter des vocations (dans tous les domaines, y compris le domaine littéraire) que l’éclipse.

Cet obscurantisme avance masqué derrière des arguments qui se veulent progressistes (le principe de précaution), ce qui fait qu’il devient très difficile de s’y retrouver.

Tout le monde aurait évidemment compris que l’Education Nationale recommande aux professeurs de toutes matières et de tous niveaux d’utiliser l’observation de l’éclipse comme matériau pédagogique, tout en leur demandant de prendre toutes les précautions nécessaires lors des observations.

Tout le monde aurait évidemment applaudi si l’Education Nationale, anticipant un phénomène dont la date, après tout, n’est connue que depuis l’antiquité ! , avait distribué des lunettes adéquates aux élèves (au lieu des tablettes numériques qu’elle s’apprête, par exemple à distribuer. Les tablettes valent 200 €, les lunettes valent 0.50 €).

Mais en recommandant aux enseignants de ne pas sortir les élèves, non seulement, l’Education Nationale n’est plus dans son rôle, mais elle passe dans le camp ennemi, celui que combattait Jules Ferry.

A quoi cela sert-il d’afficher des objectifs de transdisciplinarité, d’école citoyenne si les occasions les plus naturelles ne sont pas saisies ?

Combien de réformes lourdes et jamais appliquées, combien de tableaux interactifs ou de classes numériques simulant, de façon très imparfaite, l’éclipse seront-ils nécessaires pour contrebalancer ces aberrations ?

Très heureusement, des dizaines de milliers de professeurs vont sortir de leur classe demain matin et faire observer l’éclipse à leurs élèves. Le problème, c’est qu’on a de plus en plus l’impression que l’enseignement repose sur eux et qu’ils sont comme “détachés” des objectifs globaux de leur administration. Détachés, pour ne pas dire “en résistance”.

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